19 Septembre 2018
Pourquoi financer l’écriture de la Saison 2 ?
Parce qu’une écriture de qualité demande beaucoup de temps, vraiment beaucoup de temps.
Parce que l’écriture n’est pas mon travail principal, c’est une grande passion qui ne me permet pas pour autant de vivre à elle toute seule : mon travail principal c’est agriculteur, à temps plein.
04 Envie de Jérémie pendant les cours (mai 2001).
Le lendemain de ce premier après-midi de baise avec le beau Jérémie, je me rends en cours très impatient de le revoir et surtout de tenter de savoir s'il a envie de recommencer.
Oui, je suis impatient, mais aussi un peu troublé : comment me comporter avec lui après ce qui s’est passé ? Le bogoss a bien précisé que je dois rester discret, que personne ne doit savoir, sous peine de me faire défoncer la gueule.
Alors, quelle attitude adopter ? Faire comme si de rien n’était ? L’éviter ? Attendre et voir d’abord son comportement à mon égard ?
Guidé par la profonde naïveté qui est la mienne à cette époque, je me dis que cette bien sympathique « révision » pourrait nous rapprocher, qu’une sorte de complicité pourrait prendre la place de l'indifférence qu'il m'a montrée jusque-là.
Oui, j’étais un jeune garçon rêveur, dérivant au milieu de son plus beau rêve ; et je songeais les yeux ouverts.
Dès mon approche au lycée, je balaie de mon regard fébrile l'espace autour de moi, le cœur qui bat à mille à l’heure, impatient de capter sa plastique de fou.
Je le retrouve à sa place habituelle dans la cour, à côté des scooters, en train de discuter et déconner avec les camarades, en train de fumer une clope, comme d’habitude.
Le bogoss a l’air tout à fait naturel, comme si rien ne s’était passé hier après-midi.
Alors que moi, je suis tout chamboulé : j’ai l'impression d'avoir le dessin de ses abdos imprimé sur le front, comme si on pouvait lire sur ma peau ce qui s’est passé la veille ; oui, j’ai l’impression d’avoir l’air d’un mec qui s’est fait divinement dépuceler.
Un t-shirt noir col rond, parfaitement coupé, nouveau coton fin sculptant le relief de ses pectoraux et dessinant avec une précision redoutable la forme en V de son torse de rugbyman ; un short camouflage, des chaussures de couleur rouge intense, tout comme sa casquette, rouge et estampillée du logo Ferrari : un cheval cabré, certainement un étalon, presque une métaphore de cette puissance sexuelle avec laquelle il m’a retourné, au sens propre comme au sens figuré, lors de notre première « révision ».
Bref, voilà sa tenue, un ensemble comme toujours très simple mais tellement masculin, redoutablement sexy.
Mon regard prend un plaisir intense à se balader entre sa chaînette posée sur le coton noir, le petit grain de beauté dans le cou juste au-dessus de la ligne du col du t-shirt, et le tatouage dessiné juste en dessous de la manchette gauche, gravé sur cette peau mate que je sais désormais être d'une douceur à donner des frissons.
Brun, jeune, musclé, débordant de virilité, un sourire ravageur, Jérémie est vraiment trop trop bandant.
Le fait est que tout en lui – sa plastique de fou, sa bonne petite gueule, ses attitudes de mec, sa réputation de tombeur de nanas – appelle violemment au sexe. Plus qu’un appel, c’est un cri insupportable. Oui, définitivement, ce mec est né pour faire l’amour.
Au fil des années, j’ai fini par lui donner un surnom, dans ma tête : « Mr Sexe ». Et maintenant que j’ai gouté à la puissance sexuelle de « Mr Sexe », je n'ai qu'une envie, celle de me mettre à genoux devant lui et de le sucer.
Je le regarde serrer des mains, faire des bises à ses potes, déconner avec ; je le regarde, assumant parfaitement ce corps de fou, sa petite gueule à faire jouir d'urgence, cette canonitude hors normes, se faufilant le plus naturellement du monde dans l’épais faisceaux des fils invisibles que sont les désirs violents qu'il inspire ; je suis fasciné par sa façon d’évoluer avec nonchalance à travers la dense jungle de regards qui se posent sur lui à chaque pas, qui essaient de le retenir, d’attirer son attention ; et je suis interloqué par sa façon d’être à la fois sensible et imperméable à ces regards : sauf, évidemment, lorsqu’il a choisi où poser son regard de b(r)aise.
Je n’arrive pas à comprendre comment son attitude peut exprimer à la fois autant de conscience de son charme hors normes, le sentiment assez exceptionnel d’être très souvent, presque toujours, le plus beau mec dans l’horizon proche, et autant d'aisance et de naturel à l'assumer.
Je sais parfaitement ce que ça fait d’être considéré le mec, le camarade qui ne « compte pas », celui qu’on ne calcule pas, le dernier à être choisi pour former une équipe de foot lors des cours de sport, celui qui a l’air tellement pas dans le coup qu’on ne lui propose même pas le tarpé qui circule dans une soirée ; celui qui est pointé du doigt comme étant pd, tout simplement à cause de sa timidité, de son manque de passion pour les sports et toute autre activité « de mec » ; ou bien parce qu’il n’arrive pas à empêcher son regard de se balader là où « il ne devrait pas ».
Mais comment un super bogoss vit-il son statut de « mégabombasse », comment il vit sa popularité ? Comment, quand on est un tel canon de mec et qu’on en a, à l’instar de Jérém, pleine et parfaite conscience, comment on vit cela au quotidien, au plus profond de soi-même, comment on vit le fait de voir tant de regards et de désir se poser sur soi ?
Si je me suis souvent posé ce genre de questions, j’en viendrai plus tard à la conclusion que si un mec comme Jérémie est pleinement conscient de son charme et des désirs qu’il inspire, il n’est pas du tout certain qu’il soupçonne l’existence de ce frisson insoutenable que sa vision provoque dans certains êtres, les plus fins gourmets de la beauté masculine. Est-il conscient des remous insoutenables que sa beauté provoque dans la sensibilité exacerbée de ces esprits passionnés ?
Comment pourrait-il l’être ? Comment pourrait-il, si au moins une fois dans sa vie il n’a ressenti ce truc déroutant, un désir à en avoir le souffle coupé, un désir total, qui happe l’esprit tout entier, un désir hélas accompagné de l’insupportable certitude de l'inaccessibilité de l’objet de ce désir implacable.
Est-ce qu’il a un jour senti ce truc déroutant ? Non, je le ne crois pas. Un mec comme lui, n’a qu’à claquer les doigts pour assouvir son désir. Ainsi, le désir ne demeure pas assez longtemps inassouvi en lui pour qu’il puisse ressentir ce que ressent un homo attiré par un hétéro canon qu’il n’aura jamais.
Se rend-il seulement compte à quel point sa simple présence est à la fois un bonheur sans limites et une brûlure cuisante ?
« Salut » je lui lance en classe, tout en esquissant un petit sourire.
« Salut » il me jette froidement, en passant son chemin.
Bah, me voilà fixé : pour la nouvelle complicité, on repassera. J’ai l’impression que notre petite galipette va plutôt amener une nouvelle froideur entre nous.
Cinq minutes plus tard, le cours de français démarre.
Je ne peux décoller les yeux de lui, je n'arrive pas à décrocher mon regard de ce corps magnifique qui m'a donné tant de plaisir la veille.
Et je n'arrive pas encore à croire que hier après-midi ce beau mâle m'a laissé accéder à sa sexualité, qu’il m'a fait ce cadeau : ma bouche se souvient de la puissance de ses assauts, elle garde le souvenir de la vigueur de ses jets et de son goût de jeune mâle ; mes doigts, ma langue et mes fesses, la sensation jouissive du contact avec l'extrême douceur de sa peau, avec la raideur puissante de son manche ; mon entrejambe vibre encore de l’écho de ses coups de reins.
Je sens ma queue gonfler dans mon boxer rien qu'en y repensant.
Assise à côté de lui, voilà Anaïs, sa copine du moment : si elle savait !
Je la regarde et je me surprends à me demander comment le bogoss lui fait l’amour : est-ce qu’il est aussi macho avec elle qu’avec moi ? Est-ce qu’il la traite de salope ? Est-ce qu’il est aussi directif, aussi dominant ?
Je la regarde et je l'imagine en train de le sucer, en train de s’offrir à lui, images d’horreur. Je me demande si le bogoss prend avec elle autant de plaisir qu'il semble en avoir pris avec moi : est-ce qu’elle lui offre tout ce dont il a envie, comme je me sens prêt à le faire moi-même ? A l’évidence non, puisqu’il va voir ailleurs…
Evidemment, le cours de français est le cadet de mes soucis : mille questions fusent dans ma tête et monopolisent mon attention.
C’était quoi au juste ce qui s'est passé hier ? Rien qu'un coup sans lendemain ? Une curiosité, un « juste pour voir » ?
Je sais que ce mec est un mec à nanas, et qu’il enchaîne les aventures : d’ailleurs, c’est bien la première fois que je lui connais une copine pendant plusieurs semaines.
Je me demande si, au moins, j’ai été le premier mec pour lui, tout comme lui il l’a été pour moi. Je me dis qu’un mec comme ça pourrait se taper n’importe qui ; je me souviens avoir entendu que, parfois, dans les vestiaires de rugby, il se passerait des choses entre mecs, des choses dont j’aurai par ailleurs confirmation un peu plus tard cette année-là… mais est ce que Jérémie a déjà essayé le sexe entre garçons ? Il semblait bien à l’aise hier après-midi, très sûr de lui…
Rien que de le regarder assis à son banc est un pur bonheur : négligemment appuyé au dossier de sa chaise, le buste incliné, les jambes allongées et croisées sous la table, le t-shirt tendu sur son torse parfait, la petite chaîne abandonnée sur le coton noir, ses pecs ondulant au rythme de sa respiration ample et paisible, le regard fixé vers un point indéfini.
Tout ce qui constitue la beauté du monde à mes yeux à ce moment précis, est là, sous mes yeux : c’est la « poudrière » ; une petite brise rentre par les fenêtres ouvertes et caresse ma peau : c’est l’« étincelle ».
Et à un moment, ça s’embrase : je sens exploser en moi une excitation qui part de mes tétons caressés par le coton de mon t-shirt, une vibration qui se propage à mon nombril, à mon ventre, à ma queue jusqu'à irradier entre mes fesses là où le souvenir du premier passage de son manche est encore très vif. Mon désir est brûlant, mon envie de lui totale, ma queue dure comme un piquet. J’ai l’impression que ma peau est en feu, que mon visage est en feu : bref, je ressens un besoin viscéral de lui sauter dessus.
Je suis complètement absorbé dans mes pensées, je dois avoir l’air totalement ailleurs ; et lorsque la prof de français finit par me rappeler à l'ordre, j’ai du mal à redescendre. J’entends quelques ricanements monter du fond de la classe. Je commence à transpirer à grandes gouttes ; heureusement qu’elle s’est limitée à me tirer de mes rêveries, gentiment, avec un brin d’humour ; sans relever, bien qu’elle ait peut-être dû le remarquer, que je n'arrive pas à détacher les yeux du beau Jérémie qui m’accapare bien plus que son cours…
Le problème c’est que, lorsqu’on regarde quelqu’un fixement, on finit immanquablement par attirer l’attention des gens qui nous entourent, ce qui peut devenir très gênant, aussi bien pour le mateur que par le maté, et créer de sérieux problèmes.
Mais aussi, lorsqu’on regarde quelqu’un fixement, on finit immanquablement par attirer son attention : c’est ainsi qu’à un moment, je finis par rencontrer son regard de braise.
C’est inattendu, et presque violent : je suis sidéré de voir dans ses yeux, en lieu et place de son sourire charmeur, un regard bien noir qui ne signifie qu'une seule chose, à savoir, qu'il faut que j'arrête de le mater, et tout de suite !
Putain que je suis con, je l’ai vexé ; de plus, j’ai l'impression que tout le monde a remarqué mon manège : j’ai envie de disparaître plusieurs mètres sous terre. J’aurai dû me maîtriser, mais c’est plus fort que moi : je crève d'envie, envie de lui, envie de ses envies.
Pendant la pause, j'ai l'impression qu'il m'évite. Toujours pendant la pause, je le vois rouler un patin à Anaïs. Je me surprends à éprouver un sentiment violent et jamais encore ressenti avec une telle puissance viscérale : la jalousie.
Mais ce qui me trouble encore plus, c’est le fait de reconnaître dans le regard de cette fille le même désir qui fait vibrer mon corps à la simple vue de Jérémie, la brûlante envie de le sucer et de prendre son manche entre ses cuisses. Je la déteste.
Cerise sur le gâteau, cet après-midi-là, nous avons Sport. Les exercices d’échauffement, la course, le foot : autant d’occasion de solliciter mes muscles endoloris, de me rappeler ce que j’ai vécu la veille. Autant de malaise, plus encore que d’habitude, à trimballer mon corps mal coordonné, maladroit, à supporter les regards, les quolibets, alors que j’ai l’impression que tout le monde sait, ou devine, ce qui s’est passé hier après-midi.
Oui, le cours de sport, autant d’occasions pour éviter Jérémie, son regard, sa proximité, alors qu’une attirance inouïe, renforcée par le lien sensuel que cette première révision a tissé entre nous, me ramène à lui sans cesse.
Le cours de Sport, et son moment le plus redouté : celui des vestiaires, surtout des vestiaires d’« après ».
Le voir se dessaper, voir son torse exhibé avec nonchalance, chercher la bosse de son boxer : désir violent provoqué par ce corps dont je connais désormais les moindres recoins, les envies, le plaisir.
Je ne veux pas le regarder, car je suis profondément gêné par son torse dénudé : c’est con, mais j’ai l’impression que les camarades pourraient faire le rapprochement entre le dessin de ses abdos et ce même dessin, imprimé sur mon front.
J’essaie de ne pas le regarder, mais je ne peux pas ; je le vois disparaître dans les douches, je l’entends se doucher ; et je le vois revenir, une serviette autour de la taille, portée bien basse sur les hanches, à hauteur du pli de l’aine ; tellement basse que son diabolique chemin du bonheur est totalement dévoilé, tellement basse que les premiers poils de son pubis dépassent.
Non, je ne peux pas, ne pas le regarder, je suis subjugué par ce mec.
Ma contemplation est tellement insistante, qu’à un moment nos regards finissent à nouveau par se croiser. Le sien est bien noir, et il contraint le mien à se détourner.
J'ai attendu toute la journée un signe de sa part, en vain. A la fin des cours, je le vois partir avec sa pouffe, je le regarde disparaître dans la rue.
Le soir, dans mon lit, pendant que je me branle pour trouver le sommeil, je me dis que je n'ai été pour lui qu'une aventure sans suite. Et que de toute manière j'ai tout gâché avec mon comportement, mes regards qui ont fini par l’agacer.