23 Septembre 2018
05 Souvenir de Jérémie : octobre 1998 (2 ans avant « première révision »).
C’est le souvenir de la première fois où je me suis retrouvé dans les vestiaires du lycée avec mes nouveaux camarades, la première fois où je me retrouve dans les vestiaires avec lui, la première fois où je l’ai vu torse nu.
C’est le souvenir très net de son boxer orange et blanc, ce petit bout de coton tendu qui cache sa virilité, pendant qu’il déconne avec les autres camarades, oubliant qu’il est à moitié à poil, la bosse bien saillante, bien en vue ; si scandaleusement à l’aise avec son corps, habitué comme il doit l’être depuis longtemps à la promiscuité des vestiaires de rugby.
C’est le souvenir de sa main posée à plat sur ses abdos, les caressant inconsciemment, nonchalamment ; le souvenir très précis de sa chaînette qui descend entre ses pecs, de ce petit grain de beauté sexy au creux de son cou, de mon envie brûlante de lui sauter dessus.
Jérémie n'a même pas 17 ans, rien qu'une année de plus que moi et mes autres camarades, mais il fait tellement plus « mec », tellement plus jeune mâle que tous les autres. Son corps dégage une sensualité exacerbée. « Mister Sexe »…
Non seulement je le trouve beau sans comparaison possible avec n’importe quel autre mec, mais je le trouve tellement plus viril que les autres camarades.
Déjà, le fait qu’il ait un an de plus, le place à mes yeux sur une sorte de piédestal (lorsqu’on a 16 ans, un an ça compte) ; son corps de fou et sa beauté m’impressionnent ; son attitude de petit con effronté vis-à-vis de l’autorité, son côté petit branleur, son statut de cancre assumée et presque revendiqué, me fascine ; tout comme je suis fasciné par l’admiration dont il jouit de toute part, grâce notamment à ses exploits au rugby, ainsi qu’à sa façon d’en imposer, ce qui lui confère un statut de « mec qui compte », dans chaque situation, naturellement.
Oui, que ce soit sa popularité auprès des camarades de classe, des potes du rugby, des nanas, ou bien sa réputation sulfureuse vis-à-vis de ses relations avec ces dernières : tout contribue à me donner de lui une image à part, au-dessus de la mêlée.
Jérém représente à mes yeux une sorte d’absolu masculin, L’absolu masculin même : et il l’est, il l’est d’une façon désinvolte, effrontée, insolente, troublante, criante, débordante.
Pourtant, lorsqu’aujourd’hui, 15 ans plus tard, je croise dans la rue des petits mecs avec le même âge que Jérém à ce moment-là, même pas 17 ans, j’ai l’impression que de petits cons hypersexy, à gifler, exhibant fièrement leur corps fait pour l’amour, leur petite gueule à faire jouir d’urgence, leur jeunesse aveuglante et leur sensualité débordante, il y en a plein les rues.
Le fait est qu’à l’époque, je ne voyais que lui, mon « feel good boy », le garçon qui me faisait sentir bien.
Et j’en reviens au souvenir de la première fois où je me suis retrouvé dans les vestiaires du lycée avec mes nouveaux camarades, la première fois où je me retrouve dans les vestiaires avec lui, la première fois où je l’ai vu torse nu.
Et c’est aussi le souvenir de nos regards qui se croisent à un moment, le souvenir de son regard qui soutient le mien : jusqu'à que je cède, que je détourne le mien, honteux, craintif, comme toujours.