30 Janvier 2018
Dimanche 5 août 2001
Pendant de longs instants, sa langue se balade nerveusement entre mes pecs, autour de mes tétons. Puis, elle descend, approche de mon nombril. Les va-et-vient de sa main sur ma queue augmentent encore en intensité. Débordé par le plaisir, je ferme les yeux. Un nouveau frisson géant s’empare de mon corps ; sa langue atterrit sur mon nombril ; elle s’y attarde, comme si elle hésitait à descendre encore.
Je rouvre les yeux, je regarde le bogoss à moitié accroupi, sa bouche à quelques centimètres de sa main et de ma queue ; je regarde son beau brushing brun et dense et j’ai l’impression qu’il descend toujours, tout doucement.
Dans ma tête, se joue une bataille à l’issue incertaine : mon excitation physique se démène pour que le bogoss aille au bout de ses envies nouvelles, tout en espérant que ces envies soient exactement celles que je crois deviner ; mais en même temps, une autre sorte d’excitation voudrait que mon Jérém n’ait pas ce genre d’envies ; c’est le désir que mon mâle reste Le Mâle, le seul véritable « mec » de nous deux, au pieu. Une excitation, cette dernière, qui s’accompagne de la crainte que mon bobrun regrette par la suite ce moment de curiosité sensuelle, qu’il ne l’assume pas, qu’il s’en veuille, qu’il m’en veuille, que cela nous éloigne à nouveau.
Sa main sur ma queue, sa prise est ferme, douce, chaude, ses va-et-vient délicieux ; le contact de sa langue sur ma peau est fébrile : le bogoss se donne à fond, et cela semble l’exciter autant que ça m’excite.
Je ne sais pas jusqu’où il a envie d’aller, jusqu’où il a envie d’approfondir la connaissance de mon anatomie : tout ce que je sais, c’est que je viens de franchir le seuil au-delà duquel l’appel du plaisir prend le pas sur la raison.
Sa main ralentit ses va-et-vient, son souffle chatouille la peau hypersensible de mon gland : je me dis que s’il a envie de ça, je ne peux pas l’en empêcher ; je me dis que, oui, il a envie de ça, et que je m’apprête à découvrir un nouvel univers sensuel avec mon bobrun.
Est-ce qu’il va le regretter ensuite, ça, je ne le sais pas ; et puis je m’en fiche : le bogoss y va de son plein gré, il est en train de me chauffer à blanc, mon corps réclame son plaisir et il n’y a rien de mal à découvrir et à laisser découvrir l’autre côté du plaisir masculin. Alors, je décide de le laisser faire, de me laisser faire. Ni l’en empêcher, ni l’encourager, juste le laisser faire.
Mon Jérém est désormais à genoux devant moi, comme je l’ai tant de fois été devant sa virilité conquérante. Le temps est suspendu à l’hésitation du bogoss à assumer une envie qui me semble de plus en plus claire.
Lorsque ses lèvres hésitantes se posent sur mon gland, lorsque sa langue humide commence à caresser doucement le frein, j’ai l’impression de décoller pour une autre dimension. Plaisir nouveau, jusque-là interdit, impossible, plaisir délirant. Jamais je ne l’aurais cru capable de ça, mon bobrun.
Lentement, ses lèvres et sa langue glissent sur ma queue, jusqu’à ce qu’elle disparaisse complètement dans sa bouche. Ses va-et-vient s’amorcent : d’abord lents, hésitants, peu à peu ils se font plus musclés.
Je me laisse faire, incapable de réagir, complètement dérouté. J’ai besoin de me remettre de l’immense surprise, de m’« habituer » au plaisir intense qui secoue mon corps ; et ce, avant de retrouver l’instinct de faire plaisir à mon bobrun.
Quand mes mains se réveillent enfin, elles se précipitent sur son anatomie, impatientes, affamées : je caresse son cou, ses cheveux, ses épaules, ses pecs, ses tétons ; je le caresse pour lui faire plaisir, je sais qu’il aime ça ; je le caresse pour le « remercier » de ce qu’il est en train de faire.
Sa main enserre la base de ma queue, ses lèvres et sa langue se concentrent sur mon gland ; son autre main s’en va caresser mes bourses, son doigt humide s’enfonce lentement dans mon petit trou.
Très vite, je réalise que, tout comme chez moi, à rôles inversés, le contact avec ses tétons semble démultiplier chez mon bobrun l’envie de me faire plaisir. Plus je l’excite, plus il me suce avec entrain. Et j’adore ça, vraiment.
J’ai beau avoir été jusque-là passif, passif à fond, heureux de l’être ; j’ai beau avoir pris des plaisirs délirants, j’ai beau avoir joui avec ma bouche, avec mon puit de bonheur et avec mon cerveau bien plus intensément qu’avec ma queue, au point d’oublier souvent de jouir de cette façon lors de nos ébats ; j’ai beau avoir cru que c’était la seule façon de jouir que je ne connaitrai à tout jamais avec mon bobrun.
Quand mon Jérém s’affaire à éveiller ma virilité, je me découvre prêt à goûter à l’autre face du plaisir masculin. Mon bobrun me suce et ça réveille le petit mec qui est en moi : je redécouvre très vite que je peux jouir avec ma queue aussi.
Mon bobrun me pompe vigoureusement ; je ne sais pas jusqu’où il veut aller mais je sais que je n’irai pas jusqu’à lui gicler dans la bouche.
Pourtant, lorsque mon orgasme approche dangereusement, je sens ma raison flancher, mon instinct reptilien prendre le dessus : soudainement, j’ai tellement envie de jouir, de jouir dans sa bouche, envie qu’il m’avale comme je l’ai tant de fois avalé avec bonheur.
Heureusement, ma raison connait un dernier sursaut de lucidité.
« Jérém… je vais jouir… » je le préviens : dans ma voix, à la fois une supplication de me laisser aller au bout et la peur panique qu’il le fasse.
Le bogoss continue à me pomper, comme s’il n’avait rien entendu.
C’est au prix d’un effort presque inhumain que j’arrive à lui chuchoter, la voix écrasée par le plaisir qui me happe déjà :
« Jérém arrête, je vais jouir… arrête… ».
Instinctivement, je pose une main sur son épaule et je tente de le repousser, si faiblement.
Non seulement Jérém n’arrête pas ; ses mains atterrissent sur mes tétons, ses doigts caressent, pincent : il veut vraiment me faire jouir : du moins, à cet instant précis. Je suis sûr qu’il le regrettera, mais tant pis, ma volonté n’est plus.
Je perds pied. Et je gicle. Dans sa bouche. Je gicle en enfonçant fébrilement mes doigts dans sa crinière brune, en enserrant son biceps à hauteur de son nouveau tatouage en forme de dragon.
Lorsque la jouissance vient, un mec perd toute morale, oublie toute bonne résolution. Je sais que je suis en train de foutre en l’air notre histoire d’amour naissante pour un instant de plaisir, mais tant pis. Tant pis !
Sa bouche accueille mon jus tout en continuant ses va-et-vient ; le bogoss a l’air d’aimer ça, de prendre du plaisir… quand je pense que j’ai toujours cru que mon bobrun n’aurait jamais joui que par sa queue… je trouve bizarre ce tatouage en forme de dragon… je croyais que c’était un motif végétal de style tribal…
Un instant plus tard, je me réveille, seul dans mon lit. Le radio réveil indique 8h02. Il est dimanche et je viens de faire un putain de rêve de fou. Je me réveille avec sa présence qui me hante, malgré son absence insupportable ; je me réveille, une main enserrée autour de ma queue trempée, les doigts de l’autre sur mon téton ; je me réveille, le torse et les draps humides de transpiration et de jouissance, le corps et l’esprit encore vibrants de plaisir.
Putain de rêve… rêve qui me ramène à cette question qui me taraude depuis la veille : est-ce qu’il voulait vraiment me sucer, hier, dans l’entrée ? Je ne le saurai jamais. Pourtant, pourtant…
Quand je pense qu’au début de nos « révisions » le bogoss s’en fichait de me voir jouir, ou même il préférait carrément ne pas me voir jouir, comme pour oublier que je n’étais pas une nana : la seule jouissance qu’il tolérait chez moi, c’était justement une jouissance « de nana », en me faisant secouer par sa queue ; quand je pense qu’il me traitait de « sale pute », de « trou à bite », de « vide couilles », semblant me considérer vraiment comme un pur instrument pour son plaisir.
Que de chemin parcouru depuis !
Ça a commencé par la découverte et l’« utilisation » de mes points sensibles. D’abord mes tétons : c’était sa façon d’augmenter mon excitation, pour augmenter la puissance et l’entrain de ma fellation ; puis, ma rondelle : c’était sa façon de mieux préparer ma soumission à sa pénétration ; puis, ma queue : d’abord l’effleurer, puis à l’empoigner de façon plus franche, la branler ; et, à la fin, à la branler jusqu’à la faire jouir : un jour, alors qu’il était en moi, le bogoss s’est rendu compte que les contractions de ma rondelle pendant ma jouissance lui offraient des sensations de fou, entrainant sa propre jouissance.
Bref, au fil du temps, le bogoss a découvert l’astuce de me faire un peu plaisir pour se faire vraiment plaisir. Un investissement sensuel, en somme, comme une mise.
Mais depuis quelques temps, le bogoss semble prendre de plus en plus de plaisir à me faire jouir : comme si, désormais, ma jouissance comptait pour lui, au-delà de son propre plaisir sexuel.
Petit à petit, suivant une progression qui s’est quand-même bien accélérée depuis une semaine, le bobrun est passé du refus de ma jouissance, en passant par l’utilisation de ma jouissance pour démultiplier la sienne, jusqu’à la participation active à ma jouissance.
Il me semble si loin le Jérém dominateur et macho des premiers jours ; le même Jérém qui a voulu un plan avec un bel inconnu levé au On Off, juste pour me montrer qu’il n’en avait rien à faire de moi, tout comme il n’en avait rien à faire qu’on soit fidèles l’un pour l’autre ; le même Jérém qui, deux semaines plus tôt, a voulu me « partager » avec son pote pour se prouver, me montrer, et en faire son pote le témoin, que je n’étais pour lui qu’un jouet sexuel.
Au fait, nous n’avons jamais reparlé de Thibault après cette fameuse nuit. On dirait que nous avons quand-même réussi à l’apprivoiser, Jérém et moi, ou du moins réussi à la laisser derrière nous.
Pourtant, Thibault semble demeurer un sujet tabou ; une seule fois j’ai tenté de lui en parler, et Jérém m’a clairement montré qu’il n’y tenait pas.
En même temps, la seule fois où j’ai voulu lui en parler, Jérém n’était pas encore le Jérém qu’il l’est depuis une semaine : je n’ai pas tenté de demander des nouvelles de la cohabitation depuis. C’est peut-être con, mais quelque part, j’ai peur que le fait d’aborder le sujet « Thibault » puisse enrayer cette belle progression entre nous.
Alors, j’évite d’en parler. Je ne sais rien de leur cohabitation. Ça fait une semaine que j’ai envie de passer voir le bomécano : alors, cette semaine je vais y aller, c’est décidé.
Le corps engourdi par une douce torpeur, je me réveille en douceur, en humant son odeur qui flotte dans ma chambre, sur ma couette, sur moi.
Après une coucherie avec mon bobrun, j’ai toujours l’impression, en dépit des douches, que mon corps tout entier est imprégné de sa présence de mâle ; pendant des heures, des jours entiers, j’ai l’impression que l’odeur et le goût de cette semence de bogoss qu’il dépose dans tous mes trous, persistent dans ma bouche, dans mon nez, sur ma peau ; l’impression d’être marqué durablement par sa virilité. À moins que tout ça ne soit que dans ma tête, que le simple souvenir suffise à raviver en moi toutes ces sensations de bonheur.
Mon téléphone se met à vibrer : c’est ma cousine qui vient aux nouvelles. Nous échangeons quelques messages, et elle finit par m’inviter prendre un verre en ville l’après-midi même. Elle me précise qu’elle sera accompagnée par le très charmant Phil. Je trouve ça cool et dommage à la fois.
Rien de personnel, j’adore ce gars ; et je suis heureux pour ma cousine, car c’est une histoire qui a l’air de bien rouler. Le revers de la médaille c’est que, du coup, Elodie est beaucoup moins disponible pour moi. J’ai très envie de lui parler de mon nouveau, immense bonheur avec Jérém, envie d’entendre son point de vue sur les derniers développements.
Mais pour cela, il faudrait que je puisse la voir seul à seul : je sais pertinemment que, devant son mec, aussi sympa soit-il, je ne pourrai pas m’ouvrir de la même façon.
De toute façon, même si je sais qu’elle pense toujours très fort à moi, je sais aussi qu’elle ne passera pas l’après-midi à me cuisiner ; par respect de Phil, et parce que d’autres choses, de bonnes choses, occupent son esprit, et c’est très bien comme ça.
J’accepte quand-même l’invitation, j’ai envie de la revoir, de les revoir tous les deux, ensemble, heureux.
Lorsque je redescends au petit dej, il est 9h30 passé.
Maman est en train de préparer un bourguignon pour midi ; je me charge du ménage et de quelques repas pendant la semaine, mais le week-end elle tient quand même à faire de bons petits plats.
Je bois mon café au lait pendant que maman découpe, fait saisir, remue, la viande, les légumes, les oignons. Les bonnes odeurs de cuisine maison et celui de mon café au lait se mélangent, ce qui n’est pas forcément très agréable.
Maman se déplace pour aller chercher les carottes sur le meuble juste derrière moi.
« C’est quoi ces marques dans ton cou ? » je l’entends alors me balancer à brûle-pourpoint, tout en sentant son doigt effleurer un endroit de ma peau assez sensible.
Je sais exactement d’où viennent ces marques ; ce sont les traces laissées par les passages répétés des lèvres, de la barbe, des mordillements d’un beau brun en rut ; ce que je ne savais pas, c’est qu’elles soient si visibles, comme si Jérém avait inscrit sa marque sur ma peau.
« De quoi ? » je tente de gagner du temps pour trouver une explication qui tienne un minimum la route. Putain, j’aurais dû y penser avant, préparer une connerie plausible, au cas où.
« Des traces rouges… » fait elle, tout en revenant s’installer devant moi, sur sa planche à découper, les carottes à la main.
« Ah bon ? » je feins de m’étonner pendant qu’elle a déjà commencer à débiter des rondelles.
« Oui, j’ai déjà remarqué ça depuis deux ou trois jours, mais ça a l’air d’empirer… ».
Quoi lui répondre ? Je cherche, il faut que je trouve un truc, vite fait ; je ne peux quand-même pas lui avouer que ces marques sont la trace laissé par le désir, le rut du mâle qui vient à la fois me saillir et me faire l’amour, chaque après-midi depuis une semaine !
« Ca doit être les moustiques sur le canal… je me fais piquer souvent… ».
« C’est bien rouge… ».
« Ça gratte et je gratte… ».
Maman a l’air de gober mes explications.
« Mets-toi de la crème… et achète un répulsif ! ».
« Ok maman… ».
Il faut que je fasse gaffe : aucun moustique laisse des traces aussi visibles et aucune crème ne saurait soigner des blessures qui sont attaquées sans discontinuer ; tout comme il n’existe aucun répulsif pour des moustiques aussi musclés, aussi sexy, aussi sensuels, aussi chargés de testostérone ; et même s’il en existait, ce n’est pas moi qui m’en servirait : mon bobrun est le genre de moustique par lequel je veux être piqué encore et encore et encore.
Lorsque je sors, en début d’après-midi, le ciel est bien gris au-dessus de la ville Rose. Les températures se sont drôlement rafraichies, la météo est maussade : je ne serai pas étonné de voir des gouttes tomber avant le soir.
« Je suis contente de te voir, mon cousin, comment vas-tu ? » m’accueille Elodie, en me faisant la bise, toute guillerette.
Son bobrun à elle est là, je lui serre la main : Phil est toujours aussi sexy avec sa belle chevelure souple et ondulée, ses lunettes de petit intello à bouffer, sa barbe d’une semaine, plus marquée que celle de mon bobrun à moi. Phil a la petite trentaine ; et le duvet de barbe à 20 ans et à 30, ça n’a souvent rien à voir.
« Ma foi, ça va plutôt pas mal… » je réponds à ma cousine « j’ai presque fini les cours de conduite… normalement, je vais passer l’exam début septembre… ».
« Cool, il va falloir fêter ça… ».
« Attends un peu quand même… » je rigole « attends que je l’aie dans la poche… ».
« Tu vas l’avoir haut la main… ».
« J’espère… j’avais un très bon instructeur… ».
« Hum, il devait être sexy aussi, non ? ».
« Pas mal, non, pas mal… » je n’ai pas difficulté à admettre.
« Tu m’as manqué mon cousin… » enchaîne Elodie.
« Toi aussi… ».
« C’est vrai qu’on se voit moins en ce moment… ».
« A qui la faute ? » je la taquine.
« J’ai un taf monstre… » fait-elle.
« Oui, c’est ça… » je plaisante « t’as un mec, surtout ! ».
Phil rigole dans son coin, tout en faisant des papouilles à Elodie ; définitivement, ce gars a l’air vraiment adorable.
Je les regarde, si complices ; comme j’adorerais pouvoir un jour vivre ça un jour avec mon bobrun ; le vivre parce que nous en avons tous les deux envie, et sans avoir peur du regard des autres ; ou même le vivre déjà rien qu’en privé, se faire des papouilles, s’aimer sans réticences.
Phil a l’air vraiment accro. Je me dis qu’elle a de la chance ma cousine, une chance presque inespérée. Elodie est très rigolote, et aussi un brin fofolle, c’est une pile électrique ; elle est aussi très indépendante, d’un naturel cash et déterminé, un peu trop même parfois ; elle peut être aussi du genre « j’agis et je réfléchis après ».
C’est génial de se taper des délires avec elle. Mais, à côté de ça, je me suis parfois dit que ça ne doit pas être facile pour un mec de la suivre dans ses délires, et de lui tenir tête. Même moi, elle me fatigue parfois ! Ma cousine a un sacré petit caractère, avec des côtés qui, me semble-t-il, pourraient bien effaroucher un certain nombre de garçons. D’où, peut-être, la précarité de ses relations.
Certes, elle a toujours aimé s’amuser avec les garçons, chose que je peux très bien comprendre ; elle est belle, et les garçons ne se font pas prier pour l’approcher : pour une nuit, du moins. Mais quand les garçons ne font que défiler et qu’aucun ne reste, surtout lorsqu’il arrive de le vouloir, au bout d’un moment, ce ne doit plus être si drôle. J’ai parfois senti que, en dépit de son moral toujours à la déconnade, ma cousine souffrait de ne pas avoir une épaule sur laquelle se poser.
Je n’ai jamais osé lui faire la morale quant à la conduite de ses relations ; elles étaient d’ailleurs parfois si courtes que très souvent je ne connaissais même pas les garçons dont elle me disait un jour, toute guillerette : « Ce gars est génial ! » ; puis, le lendemain, l’air dépitée : « Je me suis encore fait avoir par un connard ! ».
De toute manière, je ne pouvais pas avoir la prétention de lui faire la morale, alors que je suis plus jeune qu’elle de plusieurs années, et que j’étais puceau jusqu’à encore il n’y pas si longtemps.
Pourtant, ce coup-ci je l’ai fait, car j’ai trouvé d’entrée ce Phil vraiment adorable, fait sur mesure pour elle. Je lui ai dit d’y mettre du sien, et elle a l’air de suivre ma suggestion : ils ont l’air heureux tous les deux, et c’est beau à voir.
« Mon pauvre cousin, je te délaisse… » elle se moque.
« Ça me fait des vacances… » je la cherche.
« Mais ta gueule… » elle me pique, avant d’enchaîner « sinon, raconte, t’en es ou avec ton Jérém ? ».
« Ça va ça va… ça va mieux… » je résume, un tantinet gêné de parler de ce sujet devant son Phil.
Ma cousine continue pourtant le plus naturellement du monde.
« Il faut que je te raconte… jeudi dernier on a pris un verre dans la brasserie où il travaille… ».
« C’est vrai ? ».
« On passait par là et j’ai voulu monter à Phil le copain de mon cousin… ».
« C’est pas mon copain… ».
« Comment ça ? ».
« Il n’est toujours pas prêt à assumer tout ça… ».
« Vous êtes compliqués, les mecs… en tout cas, l’autre soir j’ai entendu un truc qui devrait te faire plaisir ! ».
« C'est-à-dire ? »
« Nous étions donc installés en terrasse… c’est pas lui qui nous a servi, c’est son collègue… mais à un moment Jérém est venu servir une grande table à côté de la notre… il n’y avait que des nanas… je apparemment c’était un anniversaire… peux te dire qu’il y avait de la sacré pétasse… elles avaient bien picolé… au début, c’était assez drôle, ça rigolait bien, mais à un moment il y en a une qui lui a carrément demandé à quelle heure il terminait son service… ».
« Salope ! » je ne peux m’empêcher de lâcher, comme par réflexe pavlovien.
« Et c’est pas fini… elle lui a carrément dit qu’il pourrait faire un autre genre de service chez elle… ».
« Double salope… ».
« C’était balancé sur le ton de la rigolade, mais très vite ses copines ont commencé à en rajouter ; ton mec répondait du tac-au-tac, il se foutait de leur gueule, plutôt taquin, mais sans jamais rentrer dans leur drague à deux balles ; mais elles n’arrêtaient pas, c’était la surenchère, et au bout d’un moment, on ne savait plus trop si c’était du lard ou du cochon… ».
« De la cochonne, oui… » je commence à m’indigner, très heureux par ailleurs du professionnalisme de mon bobrun.
« Mais le meilleur est à venir… » fait Elodie « au bout d’un moment, ton mec dégaine son plus beau sourire et leur balance : Désolé, les filles, je ne suis pas libre ! … Et là, celle qui lui faisait du rentre dedans, et que j’appellerai pudiquement « Peggy », lui balance : T’as une copine ? … Et là, je te jure que c’est vrai, et Phil peut en témoigner, ton bobrun la regarde droit dans les yeux et lui envoie en pleine gueule : J’ai un copain… ».
« Il a dit ça ? » je m’étonne, comme abasourdi après avoir reçu une claque en pleine figure.
« Oui, oui, mot pour mot… ».
« Je ne te crois pas… ».
« Je te jure… je te jure… je te jure sur la tête de Madonna… hein, Phil, que c’est vrai ? » fait Elodie en cherchant le regard de son homme, alors que ce dernier hoche déjà de la tête.
« Bah, ça alors… ».
« Peggy avait l’air sciée… une de ses copines lui balance : Mais qu’est-ce que tu peux être cruche, tu ne vois pas qu’il se moque de toi ? … Pendant ce temps Jérémie se marrait en dandinant la tête, il se foutait vraiment de leur gueule ; l’autre cruche de Peggy n’arrivait pas à savoir à quoi elle devait croire, et elle balance : Tu aimes vraiment les mecs ? … La copine revient à la charge : Mais vraiment on te ferait gober n’importe quoi… mais tu l’as regardé ? Si lui il est PD, moi je veux bien être lesbienne !
Moi j’étais morte de rire… je crevais d’envie de me lever et de lui dire que, déjà, de 1 : le mot « homo » c'est mieux que PD ; et, de 2, qu’elle pouvait se préparer à bouffer du minou ! A la fin, tout le monde a fini par comprendre que le beau serveur se foutait de leur gueule… ce qui était vrai d’une certaine façon… mais pas du tout dans le sens qu’elles l’ont compris… si elles savaient, les pauvres cruches ! ».
« Il a dit ça juste pour s’en débarrasser… » je reviens les pieds sur terre.
« C’est ce que je me suis dit aussi… mais enfin… reste le fait qu’il l’a dit, et qu’il a bien un mec dans sa vie, pour de vrai… ».
« C’est vrai qu’on se voit souvent en ce moment, mais c’est pas pour ça que nous sommes ensemble… enfin… pas comme vous deux… ».
« Va savoir si sa petite blague n’est pas le signe que quelque chose commence à mûrir dans son esprit… ».
« J’aimerais tellement… mais c’est pas encore demain qu’on nous verra assis à une table en terrasse en train de faire des papouilles… ».
« T’as envie de ça ? ».
« Oui, mais c’est pas une obligation… ce que j’aimerais, c’est faire des choses avec lui, qu’il me laisse rentrer un peu plus dans sa vie… j’aimerais pouvoir l’inviter prendre un verre avec nous, papouilles ou pas, mais passer des moments ensemble… sans forcément crier sur tous les toits qu’on est ensemble, mais sans non plus avoir besoin de se cacher… ».
N’empêche que ça me fait plaisir d’entendre cette petite anecdote au sujet de mon bobrun. Je suis vraiment touché. Je ne veux pas me faire des illusions, je m’oblige à me dire que cela n’est rien de plus qu’une moquerie ; pourtant je suis heureux.
« Je vais avoir deux semaines de congés, du 13 au 26 août… » enchaîne Elodie « si tu es dispo, mon cousin, on pourrait partir quelques jours à Gruissan tous les deux… ».
« Ce serait coooool… ».
« Phil nous rejoindra certainement le week-end, ou plus, s’il peut se libérer… ».
« Super plan ! » j’essaie de me montrer enthousiaste, même si j’ai un peu de mal avec l’idée de m’éloigner de mon bobrun ; je n’ai pas envie de casser cette belle progression, je veux profiter de lui un max.
Il n’est que 16 heures lorsque nous nous séparons. J’ai envie de marcher, sans but ; j’ai envie de marcher seul, en repensant à mon bonheur. Pourtant, je sais que ça ne va pas être possible. Je le sais pertinemment : je peux essayer de m’imposer tous les détours possibles ; à un moment ou à un autre, mes pieds et mes jambes profiteront d’un instant d’inattention de mon esprit pour me conduire tout droit à Esquirol.
Mon bobrun me manque, et aujourd’hui je ne peux même pas le recevoir pendant sa pause : ça va être dur. D’autant plus que la petite conversation avec ma cousine m’a donné encore plus envie de le revoir.
En attendant, je flâne dans la rue d’Alsace-Lorraine, le regard aimanté par les bogoss traversant mon champ de vision : des bogoss trop souvent « encombrés » de leurs copines, en cette balade du dimanche après-midi.
Croiser un bogoss dans la rue, émotion intense, bonheur immense, émouvant, bouleversant ; croiser un bogoss, et s’attarder inévitablement sur ses traits masculins, attirants, rassurants parce que masculins ; chercher son regard, puis le fuir : non seulement pour éviter de me faire remarquer, mais parce que, dès le premier contact, ce regard fait vibrer en moi des cordes sensibles.
Croiser un bogoss et me laisser impressionner par son allure de mec, allure qui exprime la force, l’assurance ; allure parfois un peu brute, mais nature, sans sophistications, le genre qui m’attire le plus ; croiser un bogoss et me délecter parfois d’un parfum, d’une odeur qui me fait tourner la tête, comme la promesse d’un univers sensuel inconnu ; ou bien capter une voix, une vibration d’homme, une palette de sons qui est comme une caresse pour mon oreille et mon esprit.
Croiser un beau garçon, et être touché à chaque fois par un ensemble de caractéristiques mâles suscitant le désir. Un désir violent, fait d’envies aussi intenses que fugaces : l’envie de me laisser envahir par sa puissance mâle, le besoin de lui offrir mon corps pour sa jouissance ; l’envie de le serrer dans mes bras, de lui faire des câlins ; l’envie d’en recevoir, des câlins, de me sentir en sécurité dans ses bras puissants ; l’envie de connaître son existence, tout simplement.
Chaque « rencontre » avec un beau garçon m’inspire un mélange de toutes ces émotions, un mélange différemment dosé : chaque garçon, c’est une formule masculine unique ; chaque rencontre, un bonheur sans cesse renouvelé.
Bonheur tellement puissant, débordant, capable de me faire croire souvent à la rencontre avec la perfection masculine absolue ; illusion passagère, aveuglement d’un instant pendant lequel le charme particulier d’un bogoss fait de lui l’exemplaire unique de l’une des infinies facettes de cette perfection masculine, mais avec son petit « truc » en plus : ce qui fait qu’à chaque fois, la rencontre avec un bogoss est une nouvelle découverte, un nouveau choc, une nouvelle révélation.
La séquence est toujours la même : rencontre, bonheur des yeux, la respiration qui s’accélère, le cœur qui s’emballe, le désir impérieux, déchirant, la frustration assommante de ne pas pouvoir aspirer et emporter avec moi l’émotion d’un instant qui semble renfermer en elle la beauté de l’Univers tout entier ; frustration de ne pas pouvoir lui offrir le plaisir inouï que chacune de mes fibres voudrait lui apporter ; frustration de le voir disparaître aussitôt de mon horizon qu’il y est apparu, frustration qui me ronge, qui me déchire.
Puis, si la chance m’offre la possibilité de contempler un beau mâle un peu plus longuement, l’émotion qu’il m’inspire commence à évoluer peu à peu, elle passe par d’infinies nuances, aussi nombreuses et aussi changeantes que les couleurs d’un coucher du soleil.
Les minutes avancent, le désir est toujours là, intense, brûlant ; pourtant, peu à peu ma respiration se calme, mon cœur ralentit, la tempête passe ; je ressens une intense sensation de bien-être se répandre dans mon corps, dans mon esprit. Plus je regarde ce garçon, plus je me sens bien, en phase avec moi-même ; tout mon être est envahi par un bonheur et une douceur infinie, par un doux apaisement. Comme après un orgasme. C’est le bonheur de capter, sentir, respirer l’esprit masculin, expérience bouleversante à chaque fois.
Une expérience qui ne survit pas longtemps, un désir qui commence à s’évaporer dès que son objet disparaît de ma vue et de ma vie, laissant derrière eux comme une trainée de bonheur indéfini, générique, mais intense, laissant dans mes yeux et dans mon esprit comme un petit arrière-goût de reviens-y.
Jamais le fait de regarder une nana m’a provoqué la moindre question, la moindre émotion, la moindre excitation, le moindre désir sensuel, le moindre apaisement : non, rien de rien. Ça doit ça être la définition de pd (oui, quand on l’est, on a le droit de dire pd).
Regarder un bogoss, ressentir le désir, intense, déchirant, et me sentir tellement vivant. Pourtant, le désir que je ressens pour mon bobrun éclipse tous les autres.
Soudainement, je réalise que pendant que mon esprit était happé par mes réflexions, mes jambes en ont profité pour m’approcher dangereusement d’Esquirol. J’emprunte alors une traverse, j’amorce un détour par les petites rues pour retarder le bonheur ultime, l’instant où l’image de mon bobrun va pénétrer ma rétine.
Un peu plus loin, je tombe sur une petite bande de mecs installés à une terrasse de bar. Ils doivent être une petite dizaine, ils ont l’air de petits rugbymen ; hypothèse qui semble se confirmer lorsque je réalise qu’ils sont en train de regarder (et de refaire en même temps, de façon plutôt musclée et bruyante) un match de ballon ovale.
Dans le lot, il y a des bruns, des châtains, un blond très clair ; il y a des t-shirts ajustés, d’autres plus amples, des cols ronds, d’autres échancrés ; il y a des shorts, des survêts ; il y a des beaux mecs, des moins beaux, des charmants, des quelconque ; mais comme toujours, dans le bilan riche est complexe de la bogossitude globale d’une bande de mâles, l’ensemble vaut davantage que la somme des simples éléments ; certains spécimen ont, certes, tiré sévèrement de leur côté la couverture de la sexytude : l’ensemble de la meute profite de cette proximité masculine, de cette complicité, de cette passion commune, de cette bonne ambiance, de cette camaraderie, de ce mélange de différentes essences de testostérone.
Je les regarde en me demandant si, sur les dix, il y en a au moins deux qui ont déjà partagé plus qu’un match de rugby et une bière. Pourtant, ce qui saute petit à petit aux yeux en les regardant, au-delà du côté bruyant de leurs échanges, ce que je ressens, au plus profond de moi, c’est surtout une profonde sensation de calme, de sérénité, de bien-être. Ce que je ressens, c’est l’envie d’être avec eux. Lorsque l’esprit masculin se révèle en meute, c’est le plus beau des spectacles.
Et là, soudainement, je suis frappé par une idée qui s’affiche dans ma tête avec la clarté et la violence d’une révélation. Soudainement, la nudité de mon bobrun s’affiche dans mon esprit ; je ferme les yeux, je revois le lignes sobres et fermes dessinant le V de son torse, ses épaules, son cou ; je revois les lignes arrondies dessinant ses biceps, ses bras, le rebond de ses fesses.
Oui, c’est comme une petite révélation qui vient de s’afficher dans ma tête, une révélation au sujet de l’absolue beauté du corps masculin.
Le corps masculin, anatomie qui me parle, qui m’attire, qui m’est familière, agréable à regarder, à toucher ; le corps masculin, ce bonheur plastique composé de reliefs, de creux, de rebonds, de proportions, d’harmonie des formes ; le corps masculin, délicieux mélange de puissance et de douceur : de lignes fermes, droites, nettes, comme tracées à l’équerre, inspirant la solidité, la mâlitude, l’érotisme, la puissance sexuelle ; mais aussi de lignes, plus douces, courbes, arrondies, comme un rappel de sensualité, comme l’annonce de la douceur de sa peau, de la douceur de l’esprit tapie sous la carapace de mâle.
Tout pris dans mes réflexions, je ne me suis même pas rendu compte que j’ai repris à marcher ; et que mon pilote automatique m’a amené direct devant la brasserie.
J’ai atterri de l’autre côté de la route et très vite, je réalise que je n’ai plus le temps de me préparer, je ne peux plus rien faire pour l’éviter : un choc visuel inouï, inattendu, insupportable, m’attend.
J’ai beau être préparé à la bogossitude de mon bobrun, elle semble se renouveler, devenir chaque jour plus aveuglante : et comme s’il ne suffisait pas sa prestance naturelle pour en mettre plein la vue, il faut que ses tenues choisies de bogoss soient mises à contribution.
Oui, ce dimanche le temps s’est bien rafraichi ; ce qui autorise à abandonner provisoirement le t-shirt pour des tenues un peu plus habillées. Mais là, dans ce CAS précis, ce n’est pas juste habillé : sa tenue est une claque puissante à me faire tomber à la renverse. Je suis figé, comme assommé par l’image qui vient de traverser, bruler, violer ma rétine. Pendant un instant, je me dis que mon cœur va s’arrêter.
Car mon regard est attiré, aimanté, happé, aveuglé, cramé par la vision de son torse, de ses épaules, de ses biceps, de son cou gainés, mis en valeur, sublimés dans une putain de chemise blanche tellement bien coupée qu’on la croirait taillée sur mesure ; elle tombe sur ses épaules, elle épouse sa plastique avec une précision redoutable.
Le col rigide, cassant juste à la bonne hauteur, ni trop plié, ni pas assez, est rassemblé par une cravate noire au nœud assez lâche, tombant juste en dessous du dernier bouton ouvert : c’est une cravate plutôt longue, pas trop large sans être trop fine ; une cravate dont la pointe arrive jusqu’à sa belle et épaisse ceinture de mec en cuir noir, indiquant ni plus ni moins la direction de sa braguette, l’emplacement de sa virilité ; comme une invitation vers l’insupportable tentation, tentation cachée dans ce sublime pantalon noir, moulant son cul divin.
Ses avant-bras sont dégagés, les manches retroussées juste au-dessus des coudes ; une jolie montre de mec habille son poignet. Ses baskets noires à l’épaisse semelle blanche semblent comme léviter au-dessus du sol pendant qu’il voltige entre les tables.
Dans sa tenue habillée, le bogoss dégage une classe qui me déstabilise, me désarçonne ; il révèle une nouvelle et inattendue facette de sa pure et insaisissable bogossitude, une facette qui contraste tellement avec le petit con « t-shirt /casquette à l’envers » dans lequel j’ai l’habitude de le voir s’illustrer. C’est un contraste qui me rend dingue et qui enflamme mon désir.
Le bogoss vient de servir des boissons à une table, il vole à une deuxième pour un encaissement ; il disparait ensuite à l’intérieur de la brasserie.
Il réapparait quelques instants plus tard. Il s’arrête sur le seuil, les coudes pliés, les mains sur les flancs, le regard en mode radar, parcourant minutieusement l’espace de la terrasse. Puis, voyant que personne ne semble réclamer son intervention, il déplie les bras, il appuie son épaule contre le montant de l’embrasure de la porte, le bassin un peu en avant, l’attitude nonchalante et très très virile, position qui me rappelle certaines pauses cigarettes entre deux séquences de coups de reins. Le bogoss passe les doigts dans ses cheveux bruns pour les ramener en arrière ; puis, il finit par glisser les deux mains dans les poches.
Une seule envie à cet instant, celle de lui arracher sa chemise et de me jeter sur sa braguette offerte, affamé de lui ; ou bien son parfait opposé, celle de défaire les boutons un à un, de découvrir petit à petit sa peau, ses petits poils qui repoussent, les délicieuses odeurs retenues par le coton boutonné ; de titiller sa puissance virile par-dessus le pantalon, de la sentir monter en puissance, de faire enrager la bête avant de la libérer et de la laisser exprimer toute sa fureur.
C’est bien dommage que Jérém ne prenne jamais sa pause avec ses tenues du taf… qu’est-ce que j’aimerais le pomper dans cette tenue !
Je le fixe tellement que le bogoss finit par remarquer ma présence. Je le vois plier le cou, plisser les yeux, jouer l’étonnement avec ses sourcils ; mais ce que je vois surtout, c’est son putain de sourire brun incendiaire, ce sourire qui réchauffe cette journée maussade à bloc, ce sourire qui ferait ressembler un mois de janvier au pôle Nord à un mois de juillet au Sahara.
Le bogoss sourit et me fait signe d’approcher. Alors, je n’ai plus le choix, mes jambes m’amènent toutes seules, je m’engage pour traverser la route.
Au fur et à mesure que j’approche, sa chemise dévoile d’autres détails de sa perfection. Les pans avant mettent en valeur ses pecs bombés, juste ce qu’il faut, pas trop moulés, mais bien suggérés, donnant à la fois une impression de coupe ajustée et agréable à porter. Voilà la magie provoquée par la rencontre divine d’une coupe parfaite et d’un corps divin.
La tenue ne fait peut-être pas le moine, mais elle contribue sérieusement à mettre en valeur un bogoss. A moins que ce ne soit le bogoss qui met en valeur la chemise.
Si elles savaient, ces pouffes (Pouffe = nana dont le seul et impardonnable défaut à mes yeux est son envie de se taper mon Jérém) qui le dévorent des yeux, qui lui tapent la discute ; si elles savaient le torse de fou, les merveilles plastiques et sexuelles qui se cachent sous cette belle chemise, si elles savaient à quel point je les connais par cœur ; si elles savaient à quel point cette bombasse de serveur me fait l’amour comme un dieu, et à quel point il prend son pied avec moi : ça les calmerait, et pas qu’un peu !
J’approche et je suis de plus en plus ébloui par la couleur immaculée du tissu ; ébloui par le contraste saisissant avec sa peau mate et bronzée, avec sa crinière brune au brushing impeccable, avec son regard ténébreux mais souriant ; ébloui par la couleur noire de la cravate, du pantalon, des chaussures, comme un rappel du côté très brun de toute sa personne.
Je suis désormais devant lui, nos regards se rencontrent, s’aimantent. Son sourire ne quitte pas son beau visage. Ça a l’air de lui faire plaisir que je sois là.
« Salut ! » il lance en premier.
« Salut… » je lui réponds « tu vas bien ? ».
« Ouaissss… je cours… tu veux boire un truc ? ».
« Euhhhh… je… si tu veux… ».
« Allez, je t’invite… t’as qu’à t’installer à la petite table dans le coin là-bas… ».
« Ok… merci… ».
« Tu prends quoi ? ».
« Une bière blanche… s’il te plaît… ».
« Je reviens… ».
Je le regarde repartir et je n’arrive pas à détacher les yeux de lui, de cet ensemble chemise-cravate, code masculin par excellence.
Sa chemise est impeccablement repassée : qui l’a repassée ? Est-ce mon bobrun sait repasser ?
Je l’imagine, torse nu et boxer, ou bien torse nu et pantalon noir, le matin, la peau fraîchement douchée, en train de repasser, avant de la passer, sa chemise ; j’imagine ses gestes amples de bogoss, son bras qui enfile la première manche, l’autre qui part vers l’arrière chercher la deuxième, le col qui atterrit sur son cou puissant, le haut qui se cale sur ses épaules, les pans encore ouverts qui retombent sur son torse musclé, caressant ses pecs, son dos, ses flancs, ses reins, le plis de son bassin.
J’imagine ses doigts en train de boutonner les manchettes ou bien de les retrousser directement ; je l’imagine en train de fermer un à un les boutons sur le devant, tout en laissant sciemment le dernier ouvert ; je l’imagine relever le col rigide, faire glisser la cravate encore défaite ; s’attaquer au nœud : il sait aussi faire un nœud de cravate ? J’en suis incapable !
Je l’imagine en train de passer la chemise dans le pantalon, ajuster sa ceinture, passer ses chaussures ; un dernier passage devant le miroir pour une dernière touche au brushing de bogoss et le voilà parti pour sa nouvelle journée. Je donnerais cher pour pouvoir assister à cela ne serait-ce qu’une fois.
Lorsque je reviens de mes délires, je réalise que le plus irrésistible dans cette tenue est la façon qu’à mon bobrun de la porter ; sur mon Jérém, cette tenue fait à la fois élégante et décontractée, habillée et cool, traditionnelle et très jeune, soignée et impertinente, classique mais tellement vivante ; sur mon Jérém, cette tenue est relevée par sa prestance, sa présence, par une puissante touche de fraîcheur, de jeunesse, d’impertinence, d’effronterie et de sexytude : ce qui donne un mix explosif, tout ce qu’il y a de plus sexy.
Dans sa tenue habillée, on dirait un jeune premier, un acteur, un mannequin, tous aussi à l’aise que s’il portait un t-shirt et un short. Il y a dans ses gestes, dans son allure, une aisance, une assurance, un naturel presque déconcertants. Il faut le voir marcher avec de grandes enjambées, le dos bien droit, les pecs bombés, le regard magnifique, la cravate qui part à gauche, à droite, qui se colle à son torse ou se penche dans le vide au gré et en réaction contraire de ses mouvements rapides et incessants.
Tout dans sa tenue et dans son attitude semble vouloir exprimer : « Ok, je porte une chemise et une cravate ; tout le monde peut être élégant avec une tenue pareille ; mais moi, je vais être non seulement hyper classe avec, mais en plus je vais être ultra sexy, et même réussir l’exploit de faire ressortir mon côté « p’tit con » ; un « p’tit con » avec une chemise élégante et une cravate (délicieux oxymore) ; déjà, mon dernier tatouage va quand même dépasser ; ensuite, il suffit de desserrer un peu le nœud, de laisser le dernier bouton ouvert ; je laisse ma bonne petite gueule à hurler armée en permanence de mon regard charmeur et de mon sourire incendiaire… et hop ! Le tour est joué… ».
Oui, le tour est joué : voilà Docteur P’tit con et Mister Classe dans une seule et unique bombasse.
Le bogoss disparaît une minute à l’intérieur et réapparait avec un plateau chargé à bloc qu’il décharge presque entièrement à une grande table ; à l’exception d’un verre et d’une petite bouteille qu’il vient déposer devant moi.
Pendant qu’il se penche vers moi, mon regard tombe tout naturellement dans ce petit triangle de peau mate au-dessus du nœud de cravate un peu desserré ; c’est délicieux d’observer les mouvements de sa pomme d’Adam sous la peau couverte de quelques poils de barbe ; j’arrive même à entrevoir son petit grain de beauté si mignon, si adorable, si sexy ; tout comme il l’est, sexy au plus haut degré, le haut de son tatouage sortant du col de la chemise et remontant à la verticale vers l’oreille.
Mon bobrun est super classe dans sa tenue habillée, mais il dégage en même temps un truc vraiment animal, comme une odeur de mâle baiseur : un baiseur classe, brûlant. Putain, qu’est-ce que j’ai envie de lui !
« Voilà, monsieur est servi ! ».
« Merci, monsieur… ».
J’aimerais tant qu’il puisse rester un peu avec moi. Prendre un verre avec moi. Je rêve. D’autant plus que la terrasse est bondée et que le bogoss semble seul à cette heure de la journée.
« Eh merde, il me faut encore courir… je reviens… » fait le bobrun sur un ton agacé, alors qu’une main vient de se lever à une table à l’opposé de la terrasse.
Dommage. Je me console en appréciant à sa juste valeur l’incroyable l’évolution de mon bobrun, dans ses attitudes, ses gestes, sa façon d’être, son comportement vis-à-vis de moi : il n’y a encore pas très longtemps, s’il m’avait surpris en train de « roder » autour de la brasserie, il m’aurait regardé en travers, ou même carrément jeté ! Et là, il me fait installer en terrasse, il m’offre à boire, il a l’air content de me voir.
Je le regarde repartir et j’en profite pour me pencher sur l’« envers du décor ». Côté dos, la chemise redessine tout aussi divinement sa plastique : le col immaculé frôle par moments la naissance de ses cheveux bruns, souligne le V de son torse, la ligne de ses épaules. Parfois, lors de certains mouvements, lorsqu’il se penche sur une table pour récupérer des verres, par exemple, le tissu se tend sur ses omoplates, envoyant de très belles images de son dos puissant, laissant parfois furtivement entrevoir les mailles brillantes de sa sexy chaînette de mec. Et ce pantalon, putain, c’est juste à hurler tellement il épouse le profil délicieux de son magnifique cul musclé et rebondi de rugbyman.
Puis, quelque chose attire mon regard. Mon bobrun s’est arrêté à une table ; les secondes passent, et il semble s’y attarder, longtemps ; s’y attarder, non pas pour prendre une commande ou pour encaisser mais plutôt pour taper la discute, l’air de bien rigoler.
Autour de la table, deux petits mecs, 18-20 ans je dirais ; le premier, un châtain clair à l’air sympa est plutôt mignon ; l’autre, une pure bombasse atomique.
Très brun, la peau mate, les cheveux souples, ondulés, un peu en bataille, retombant en mèches rebelles sur son front, sauvage crinière de jeune loup ; les yeux naturellement plissés, perçants, donnant à son regard une intensité troublante, des yeux "sabre laser", dégageant un érotisme permanent, comme des flammes de sexytude bouillante.
Le jeune wolf est habillé avec un t-shirt blanc col en V avec échancrure affolante ; t-shirt soulignant un torse élancé et très bien bâti, échancrure laissant dépasser une chaînette fine et assez courte, tombant à hauteur de sa clavicule : bref, très beau mec, très beau et très mec.
Jérém a l’air tout particulièrement complice avec ce dernier ; je les vois rigoler, je le vois lui mettre une tape sur l’épaule, passer sa main dans ses cheveux comme pour les ébouriffer : je me dis que ça doit être un de ses potes du rugby que je ne connais pas ; pourtant, je ressens une pointe de jalousie remonter de mon bas ventre. Mais c’est qui ce mec ?
Quelques instants plus tard, les deux gars se lèvent ; debout, les deux dévoilent définitivement une plastique plutôt avantageuse qui semble témoigner d’une activité sportive ou physique indéterminée mais capable de sculpter un beau physique de mec. Jérém leur fait la bise, tout en posant une main sur l’épaule du beau brun, en lui parlant face à face, très très proche de lui. Les trois rigolent une dernière fois, et se séparent.
Les deux potes quittent la terrasse et traversent la route pour aller rejoindre deux filles qui les attendent à côté de l’entrée du métro. Le mec châtain fait la bise à la première, tandis que le petit brun embrasse l’autre sur la bouche. Les quatre commencent à discuter sur place.
Jérém vient dans ma direction, sans pour autant quitter des yeux la scène qui se déroule de l’autre côté de la route ; son regard est comme doux, attendri.
Soudainement, ça fait tilt dans ma tête, je crois que je viens de comprendre le topo. Putain, Nico, t’es long à la détente…
Je ne peux quitter mon Jérém des yeux, je le trouve tellement adorable à cet instant, émouvant. Je le fixe et il finit par s’en rendre compte ; et là, en accompagnant ses mots par un petit sourire touchant, il me lance :
« C’est mon petit frère Maxime… ».
« Le brun, j’imagine… ».
« C’est lui… ».
« Je m’en doutais un peu, il y a bien un air de famille… ».
« Il est beau… » fait Jérém, le regard toujours fixé sur ce qui se passe de l’autre côté de la route.
« Tout comme son frère… ».
« Ils sont venus sur Toulouse fêter le permis de son pote Gildas… » il enchaîne comme s’il n’avait pas entendu mes mots « il vient tout juste de l’avoir… Maxime va le passer dans pas longtemps… ».
Je me trouve ridicule à avoir ressenti de la jalousie en assistant à cette complicité et à cette déconnade qui n’étaient en fait que des retrouvailles de frérots.
« Vous êtes très proches ? ».
« Mon petit frère est toute ma famille… il est tellement adorable mon Maxou à moi… ».
« Il est beaucoup plus jeune ? ».
« Tout juste deux ans… ».
Les quatre jeunes finissent par prendre la direction du centre-ville ; en marchant, le beau Maxime tient sa copine par la taille et lui pose un bisou dans le cou.
« Regarde-le s’il n’est pas mignon… un vrai petit mec… » fait Jérém, attendri et touchant au possible.
« Il a l’air adorable, oui… il fait quoi dans la vie ? ».
« Il va aller à Paul Sabatier à la rentrée, il va être ingénieur, c’est une tronche lui… ».
Un client l’appelle.
« Je reviens… » fait-il en détalant aussi sec.
Je suis vraiment touché par la petite scène qui vient de se dérouler : je suis ému par les regards, les mots, les intonations de la voix trahissant l’affection et la tendresse infinies que mon bobrun éprouve pour son petit frère. C’est beau quand la tendresse s’exprime dans le regard d’un mec tel que Jérém.
Une tendresse qui ne fait qu’amplifier encore l’infinie sexytude que dégage mon bobrun dans sa putain de chemise blanche.
La chemise blanche, tout comme le t-shirt blanc, autre grand basique, ou classique, du vestiaire masculin.
D’ailleurs, les deux vont souvent ensemble, et si bien ensemble ; j’adore deviner, sous une chemise blanche, ou d’autre couleur d’ailleurs, la marque des manchettes d’un t-shirt blanc ; ou bien, dans le creux de un, deux, trois, boutons ouverts, découvrir le col arrondi, le coton immaculé qui s’arrête juste en dessous de la clavicule, détail si sexy à mes yeux ; tout comme je trouve furieusement sexy de voir les deux pans de la chemise ouverts, en dehors du pantalon, dévoilant tout le t-shirt blanc, lui aussi en dehors du pantalon, tenue débraillée de fin de soirée où la pipe est dans l’air.
Mais nous sommes en été, et nous sommes à Toulouse. Et même si le temps est un peu maussade, cela ne justifie pas la superposition de deux couches de coton sur son beau torse.
Mais quand-même… qu’est-ce que j’adorerais voir le col rond d’un t-shirt blanc dépasser du col de la chemise, deviner la ligne des manchettes du t-shirt sous le tissu de la chemise ; ou, encore, voir sa tenue complétée par une putain de veste, une veste de jeunz, avec une coupe à la fois élégante et sportive. J’imagine tout cela, sans même savoir si je serais capable d’encaisser le choc supplémentaire.
Je me sens bander. Mais putain, même sans t-shirt et sans veste, qu’est-ce que j’ai envie de le pomper dans cette tenue !
Le bogoss revient me voir. Je viens tout juste de finir ma bière.
« C’est chaud le dimanche après-midi… » je lui lance.
« Ce soir ça va être encore pire… ».
« T’es tout seul à servir ? ».
« Mon collègue rembauche à 18 heures… ».
« T’as pas eu de pause ? ».
« J’ai commencé à 13 heures… ».
« Qu’est-ce que tu es sexy avec ta chemise et ta cravate ! » je laisse échapper, comme un cri du cœur.
« Tu veux boire autre chose ? » il trace, ignorant une fois de plus mon compliment. Pourtant, un petit frémissement dans son regard fait office à mes yeux de notification de bonne réception du message.
C’est en prononçant ces mots, que le bobrun se rend compte du double sens que je pourrais y voir, et que j’ai vu : il sourit, il est beau.
« Laisse-moi réfléchir… » je me marre, tout en regardant instamment sa braguette ; je remonte ensuite mon regard le long de la cravate noire, jusqu’à accrocher le sien ; dans ses yeux, une bonne étincelle lubrique a fait son apparition.
« Oui, j’ai envie d’un… » je le cherche.
« Jus… » il me suit.
« De… ».
« Je ne suis pas certain qu’on ait ce parfum en stock… » il me taquine.
« Quel dommage, je croyais que l’établissement mettait un point d’honneur à satisfaire le client… ».
« Pour en avoir le cœur net, il faudrait aller voir dans la remise de l’arrière-boutique… » il me lance en joignant un sourire de malade, une moue de défi, chaude comme la b(r)aise ; son regard est comme transperçant, et ce semblant de petit hochement de tête qui semble dire « t’as envie de moi, hein, t’as envie ? » est juste insupportable. Putaaaaaaaain de mec !
Son regard est perçant comme une flèche, sauvage et puissant comme ses coups de reins. Un seul regard brun et sexy et tout de suite il est Le Mâle ; un seul regard et, tout de suite, je suis à lui ; un seul regard et, dans ma tête, je suis déjà à genoux devant lui.
La perspective de le sucer dans l’arrière-boutique et dans cette tenue, me plait grave. Est-ce qu’il est juste en train de me chauffer ou bien il a une idée derrière la tête ?
« Je ne connais pas les lieux… » je le teste.
« La remise c’est la porte juste après les toilettes… ».
« Je ne pense pas être autorisé à y aller… ».
« Je t’y autorise… ».
« C’est peut-être dangereux… ».
« Il n’y a que moi qui y ai accès… ».
Putain, il ne rigole pas.
« T’es sérieux, là ? » je m’assure.
« A ton avis… » fait-il alors que l’étincelle lubrique dans son regard s’est transformée en incendie polisson.
« Vas-y d’abord, commence à chercher, je vais venir t’aider dans une minute… » fait le bogoss, l’air complètement sûr de lui.
Apparemment, il me reste qu’à suivre ses instructions pour trouver mon bonheur. Putain de mec !
Je rentre dans la brasserie, je suis l’indication toilettes.
« J’encaisse la 8 et la 12 et je vais m’en cramer une… » j’entends le bogoss lancer à son patron.
« Ok, tu en profiteras pour ramener du café de la réserve, s’il te plait… » lui retorque ce dernier.
« Ok… ».
Je me retrouve dans un couloir, je passe les toilettes, je trouve la porte indiquée ; je l’ouvre, elle donne sur une petite cour intérieure ; un peu plus loin, sur la droite, je vois une autre porte, je la pousse : c’est la remise, un petit local assez sombre, encombré de futs de bière, de packs de sodas, de café, de friandises. J’hésite à m’y engouffrer, préférant attendre l’arrivée de mon bobrun.
Mon attente ne sera pas longue : le bogoss déboule au pas de course, la cigarette au bec.
« Viens ! » il me balance, en me précédant dans le petit local ; il avance jusqu’à une nouvelle porte, il l’ouvre, il allume la lumière et nous nous retrouvons dans une cave remplie de bouteilles. Le bogoss referme la porte derrière nous, la cigarette coincée entre les lèvres, en train de se consumer à vide. Ses gestes sont rapides, empressés : je trouve très excitante cette précipitation.
Le bogoss saisit sa cigarette, fait tomber la cendre déjà en équilibre instable.
« J’ai pas trouvé le jus qui me convenait… » je le titille.
« On n’a pas ça en bouteille… seulement à pression… ».
« Comme la bière ? ».
« C’est ça ! ».
Sur ce, le bogoss pose la cigarette au coin des lèvres ; ses mains s’empressent de défaire la braguette ; pas la ceinture, juste la braguette : et là, en-dessous de la pointe de sa cravate qui semble indiquer précisément le bon endroit pour trouver le meilleur des jus, sa queue bondit, pas encore complètement tendue, mais déjà frétillante. Le bogoss récupère sa cigarette, il expire, fait tomber les cendres ; il se branle à peine et très vite la bête s’éveille.
Je me peux résister à la tentation de me jeter sur lui et de l’embrasser sur le cou, tout en portant mes mains sur ses biceps, et en appréciant le contact avec le tissu de sa belle chemise.
« Dépêche-toi, je n’ai que 5 minutes ! ».
« Ça va être court… » je commente.
« Grouille ! » fait-il, moitié en rigolant, moitié sérieux, directif, pressé de repartir et impatient de jouir, une main à sa cigarette, une autre sur mon épaule, comme une sommation à me mettre à genoux.
C’est entre une rangée de bouteilles de Côtes du Rhône et une autre de Jurançon que j’entreprends de sucer mon bobrun.
Je le pompe en frottant mon nez contre le tissu de son pantalon à chaque va-et-vient, je le pompe en caressant ses couilles que je vais aller titiller en passant les doigts dans la braguette ouverte ; je le pompe les yeux rivés sur sa tenue d’homme que je trouve hyper sexy ; je le pompe en me disant à quel point ce serait cool d’avoir le temps de défaire sa cravate, d’ouvrir un à un les boutons de sa chemise, de sentir une à une les petites odeurs de mec se dégager de sa peau, de son cou jusqu’à sa queue.
Mais il n’y a pas le temps pour tout cela. Alors, je le pompe vigoureusement, décidé à le faire jouir au plus vite, décidé à obtenir la plus douce des boissons.
Pendant ce temps, les mains du bogoss ont trouvé chacune leur rôle ; pour l’une, celui de gérer la cigarette ; pour l’autre, celui de caresser mon cou, mes épaules, ma nuque, d’enfoncer les doigts dans mes cheveux, de pourchasser mes tétons.
Je commence à m’habituer à ce genre de caresses, elles m’excitent terriblement ; mais il est d’autres « caresses », des « caresses » que nous avons un peu laissé de côté ces derniers temps, des « caresses » d’un tout autre genre mais furieusement excitantes ; des « caresses » que mon bobrun ne semble pas avoir oublié pour autant.
Ainsi, lorsque sa main se pose sur ma nuque et commence à imprimer le rythme et l’amplitude qui lui conviennent le mieux ; puis, lorsque sa main maintient fermement ma tête, alors que ses coups de reins envoient son gland loin dans mon palais : là, je suis fou d’excitation, mais aussi rassuré de voir que l’instinct de mon beau mâle brun ne disparaît pas malgré ses changements par ailleurs.
Je suis au comble du bonheur sensuel : il me semble que la douceur et une certaine animalité peuvent tout à fait coexister, s’alterner, se compléter dans les relations sexuelles.
Ses doigts écartés maintiennent ma nuque, alors que ses coups de reins, puissants mais contrôlés, se succèdent, rapides, entre mes lèvres.
Un instant plus tard, je sens son corps se crisper ; j’entends un râle étouffé résonner dans ses poumons, je sens ses doigts se contracter nerveusement et s’enfoncer dans mes cheveux, presser mon cuir chevelu.
C’est en toussotant, en balançant violemment ce qui reste de sa cigarette, certainement pour cause d’avoir avalé la fumée de travers dans la précipitation de l’orgasme ; c’est en tenant bien fermement ma nuque que le bogoss envoie de longs traits chauds et épais dans ma bouche.
Voilà le meilleur des jus, du bon jus de mâle brun.
J’ai envie de lécher son gland à la recherche de la moindre trace de cette boisson divine, mais déjà le bogoss range le matos, il boutonne la braguette.
Je me relève, je regarde son visage au front moite, les joues un brin rougies, la respiration rapide : c’est beau un mec qui vient de jouir, le physique et esprit encore secoués par l’écho de l’orgasme.
C’est là que je réalise que regarder un bogoss, c’est un bonheur absolu qui se décline pourtant à plusieurs niveaux.
Regarder un bogoss inconnu, et ressentir la sensation d’un tambour de machine à laver en phase d’essorage dans le ventre. Puis, petit à petit, l’apaisement.
Regarder une bande de potes, ça fait un bien fou.
Mais regarder le garçon que j’aime, à fortiori lorsqu’il vient de jouir, ça fait comme des popcorns qui explosent en rafale dans mon cœur. Et je ne connais pas bonheur plus intense.
« Alors, le client est satisfait ? » se moque le p’tit con.
« C’est le meilleur jus que je n’ai jamais goûté ! ».
Je tente de lui faire un bisou dans le cou.
« J’ai pas le temps ! » il se dégage, tout en prenant la peine de poser une caresse rapide sur mes cheveux.
Le bogoss rouvre la porte de la cave, la referme derrière nous ; il traverse la remise, sort dans la petite cour et s’apprête à emprunter le couloir et à disparaître dans la brasserie.
« Jérém, le café ! » je lui lance.
« Ah oui ! » fait-il en faisant demi-tour.
Pendant qu’il va chercher le café, je me planque dans l’entrebâillement de la porte des toilettes ; le bogoss arrive comme un fou, je bondis sur lui par surprise et je pose un bisou dans son cou.
« Tu peux pas t’en empêcher, hein ? » fait-il, tout en traçant son chemin.
« Non, vraiment pas… » je lui réponds du tac-au-tac, juste avant qu’il disparaisse dans la salle.
J’attends quelques secondes et je sors à mon tour dans la salle ; mon bobrun est en terrasse ; je m’avance pour sortir dans la rue et je me retrouve face à face avec au sexy serveur.
« A demain ! » je lui lance discrètement en me faisant violence pour ne pas lui sauter dessus et le couvrir de bisous devant tout le monde.
« On verra… » fait-il avec sa réplique habituelle, pourtant accompagnée par ce sourire brun, incendiaire qui pour moi, comme toujours, vaut promesse de retrouvailles sensuelles pour le lendemain.
Je quitte la brasserie sans pouvoir le quitter des yeux. Je n’ai jamais vu quelqu’un porter une chemise et une cravate de cette façon, avec cette aisance, cette sexytude, cette bogossitude.
Le soir même, dans mon lit, sous ma couette, je repense à la distance parcourue depuis le premier jour du lycée. Ce jour-là, le premier regard échangé avec ce magnifique félin mâle, un regard animal et indomptable, sauvage et insaisissable, m’avait donné la définition exacte de ce que pour moi l’idée de « bobrun ténébreux » veut dire : un regard dégageant un côté « sombre », comme un mystère qui l’entoure, qui semble vouloir instaurer une distance ; une intention qui, paradoxalement, au lieu d’éloigner, m’avait attiré et fasciné.
Par la suite, j’allais vite découvrir que, de la distance, le bogoss en gardait dans toutes ses relations, masculines et féminines, à une exception près : son pote Thibault, celui qui, je le découvrirai bien plus tard, semblait être le seul détenir une bonne partie du mode d’emploi du beau Jérémie.
Dès le premier jour, j’avais été percuté par cet érotisme incandescent, palpable, qui semblait comme l’envelopper en permanence ; un érotisme conforté par sa réputation de sérial-baiseur, chaud de la queue mais froid et sans états d’âme dans ses relations avec les filles : des relations tout aussi nombreuses qu’éphémères, des pures relations de Q.
Oui, Jérém semblait vouloir garder de la distance : une distance qu’il semblait imposer à fortiori à ceux qui n’étaient pas admis dans son périmètre de potes et de groupies.
Pendant longtemps, ce périmètre m’a semblé totalement inaccessible : comment imaginer de rentrer ne serait-ce que dans le cercle fermé de ses amitiés, alors que nous n’avions à priori absolument rien en commun ? J’avais de bonnes notes, il avait des blâmes ; il aimait boire, je ne supportais pas l’alcool ; il aimait le rugby, j’aimais les rugbymen. Il aimait toutes les filles du lycée, je n’aimais que lui.
Puis, juste avant le bac, il y a eu nos « révisions ». J’ai découvert alors un petit macho impulsif et un tantinet égoïste, habitué à toujours obtenir ce qu’il voulait, ni plus ni moins, au pieu comme dans la vie ; un petit con dont les envies sont à prendre ou à laisser, ne s’intéressant qu’à son propre plaisir : des attitudes que j’avais trouvés furieusement excitantes.
Oui, Jérém était avec moi comme il avait toujours été : bon baiseur, mais froid et distant ; il l’avait été avec chacune des filles qu’il avait mis dans son lit, et il l’était à fortiori avec moi, un pd qui lui offrait un plaisir inattendu, l’obligeant à se regarder en face, le forçant à admettre des envies inavouables ; lui demandant sans cesse, directement ou indirectement, une tendresse pour laquelle il n’était pas prêt, à laquelle il ne voulait pas céder, par crainte de se perdre.
Mon Jérém, le « feu » au lit, la « glace » dans la vie. Très bandant de se laisser dominer par ce p’tit mâle et par ses envies si claires, si puissantes : le plaisir est là, le corps jouit, et même bien au-delà de ce qu’il avait osé rêver ; cependant, dur dur de se contenter de ça quand le cœur bat très fort et réclame chaque jour avec un peu plus d’insistance sa part de bonheur.
Pendant longtemps, j’ai été confronté à un p’tit con prêt à me mettre à la porte dès qu’il avait pris son pied. Cependant, j’ai toujours senti que sous son côté froid, fermé et insondable, derrière cette sexualité animale et implacable, semblait frémir une sensualité bouillonnante : comme de la lave en fusion dans les entrailles de la terre, prête à jaillir dès qu’elle en aurait l’occasion.
Oui, j’ai toujours pensé que, dans la définition de ténébreux, il y a la notion de feu qui se cache sous la glace, un côté sensuel volcanique prêt à sauter à la gorge, comme un loup.
De même, je savais que sous la glace de sa carapace, un cœur battait. Je savais que sous la glace de son armure il y avait un être sensible, un garçon à qui la vie n’a pas toujours fait de cadeau, un être blessé.
Une sensibilité, la sienne, qui s’est manifestée parfois, brièvement, dans certaines occasions, comme ces rigoles de lave qui coulent parfois en Islande, terre de feu et de glace elle aussi, et qui disparaissent dans la mer, ou se font arrêter par la glace.
Oui, par le passé, le volcan « Jérém » a grondé par moments, et il en est violemment jailli des caresses, des attitudes qui ont tout aussi vite disparu.
Et elles ont refait surface cette semaine, plus intenses, plus puissantes que jamais : le feu tapi en lui a jailli à nouveau au travers des glaces épaisses de ses barrière mentales ; et le phénomène semble d’une envergure capable de transformer en profondeur et durablement le paysage « Jérém », ses attitudes, notre relation.
J’ai l’impression de ressentir comme une sorte d’impérieux besoin de tendresse chez Jérém, comme l’expression d’une puissante nécessité, comme un besoin trop longtemps inassouvi, une envie trop souvent refoulée, un trop plein qui ne peut plus être contenu et qui doit s’exprimer.
Tout n’est pas encore gagné, mais ça semble vraiment bien avancer. Je me dis que le jour où mon Jérém laissera sa sensualité exploser complément, sans bride, sans entraves, sans retenue, ce sera un véritable feu d’artifice, un truc insoutenable.
En attendant, que de chemin parcouru, en si peu de temps, après que les choses aient autant patiné entre nous. Peut-être que finalement tout devait se passer ainsi.
Mais désormais, sn me montrant enfin un peu de sa sensibilité, c’est un bonheur intense qu’il m’apporte ; quand je suis avec lui, je suis tellement heureux que j’ai envie de crier, de pleurer ; mon être tout entier connaît en sa présence le sens précis du mot « bonheur ».
J’ai de plus en plus envie de lui dire à quel point je l’aime. Lui dire « Jérém, je t’aime » : couplet parfait, ça rime, ça sonne si bien, comme la plus douce des mélodies, comme une évidence.
Lui dire « Jérém, je t’aime » : oui, mais à quel moment ? Dans le feu de l’excitation, avant nos ébats ? Sur l’oreiller, après cette jouissance des corps et des esprits qui sait rendre ces derniers plus réceptifs ou bien plus réfractaires ?
Lui dire « Jérém, je t’aime » et après ? Attendre à qu’il me dise « je t’aime » en retour ? Je ne suis pas sûr qu’il en soit là dans sa tête, et surtout pas qu’il soit prêt à le formuler avec des mots si précis.
Lui dire « je t’aime », et avoir son silence pour toute réponse : c’est ce qui me pend au nez, un grand moment de solitude que je n’ai pas envie d’affronter.
Ou alors, le lui dire pile au moment de se quitter, juste avant qu’il passe la porte, comme une espèce de bouteille lancée à la mer, lui donnant le temps de « digérer » le message avant de se retrouver. Mais comment se retrouver, que vais-je ressentir s’il ne va pas aborder le sujet par lui-même par la suite ?
Je ne veux surtout pas l’effaroucher en parlant sentiments. Pourtant, un jour, il va bien falloir apprivoiser le sujet : je m’attache de plus en plus à ce bel animal et j’ai besoin de savoir où nous allons, si nous allons pouvoir un jour nous demander d’être fidèles l’un envers l’autre. Le fait de l’avoir vu en terrasse de sa brasserie se faire mater par des filles, rigoler avec des filles, voilà qui réveille ma jalousie, qui me pousse à m’interroger sur cela.
Non, tout n’est pas encore gagné, mais je suis confiant. Je pense que nous sommes en bon chemin. Je sais qu’il faut laisser le temps. Je me dis que quand la lave coule, même si elle refroidit, elle crée des avant-gardes, elle fait avancer les terres, petit à petit.
En attendant, demain, lundi, mon bobrun va revenir me voir ; malgré son énième : « On verra… », je suis persuadé que le résultat sera le même que les autres fois. Son sourire était là, témoin du fait que, tout comme pour moi, lui aussi a été marqué par le bonheur sensuel hors normes des derniers jours.
Est-ce qu’il aura coupé ses beaux poils ? Ou est-ce qu’il les aura gardés pour me faire plaisir ?
Est-ce qu’il voulait vraiment me sucer, samedi, dans l’entrée ? Je ne le saurai jamais. Si seulement j’avais fermé la porte, j’en aurais le cœur net…
Oui, je suis confiant. La glace va partir. Le feu va prendre le dessus. L’hiver est fini. Le printemps avance.
L’été va venir.