24 Novembre 2024
Août 2018.
Après mon retour d’Australie, j’ai eu besoin de temps pour remettre de l’ordre dans mon cœur. Et je savais aussi que « remettre de l’ordre dans mon cœur » passerait forcément par de longues séances d’écriture. Je savais que ça viendrait, mais je ne savais pas quand ce serait le moment. J’ignorais quand j’aurais la force de me poser pour raconter le dernier chapitre de mon histoire avec Jérém, ce chapitre que je suis allé chercher à Bells Beach, à vingt-mille bornes de Toulouse. Il m’a fallu du temps pour laisser tout ça se décanter.
Cette force s’est manifestée plusieurs mois plus tard, à la veille de mes vacances d’été. Soudain, l’envie d’écrire s’est présentée à moi. Imposée à moi, plutôt. Un jour, j’ai ressenti une irrépressible envie de renouer avec l’écriture, cette maîtresse exigeante qui réclame une attention toute particulière.
Dès lors, ça avait été comme une évidence. Il fallait que je me remette devant mon clavier. Mais pour ce faire, il me fallait deux ingrédients magiques : le calme et la solitude. Il me fallait un cadre capable de me les offrir.
D’emblée, j’ai pensé à Gruissan. Je me sens bien à Gruissan. J’ai plein de bons souvenirs à Gruissan. Des souvenirs de vacances avec ma cousine Elodie, de nos discussions interminables, de notre complicité parfaite d’antan. Des souvenirs de quelques garçons qui m’ont fait vibrer de désir à la plage. Et des souvenirs de vacances avec Jérém, juste avant notre fabuleux voyage en Italie. Gruissan est pour moi le temps des souvenirs des jours heureux.
Je connais bien Gruissan et Gruissan me connaît bien. Gruissan me manque. Alors, c’était décidé, je devais y retourner. Mais ça ne pouvait pas être à l’appart des parents d’Elodie. Car cette année, mes oncles avaient choisi de le louer pendant la saison.
Mon lieu de chute historique désormais inaccessible, je me suis souvenu d’un gîte en lisière du massif de la Clape sur lequel j’étais tombé une année au gré d’une balade. Je me suis souvenu du grand jardin ombragé par de grands pins parasol, de la charmante bâtisse en pierre, du chant des cigales, de cette ambiance de garrigue et de langueur estivale dans laquelle baignait le site. Une ambiance qui m’avait apaisé l’esprit. Je me suis souvenu du nom du gîte. J’ai appelé. Et, par chance, l’un des logements était libre pendant la période de mes vacances.
Au final, l’indisponibilité de l’appart d’Élodie, c’était un mal pour un bien. Ce gîte était l’endroit idéal pour se poser au calme. Situé à l’écart de l’agitation du monde des vacanciers, j’allais être loin des distractions du Masculin. Là-bas, j’allais pouvoir passer de longues journées à avancer sur mon histoire sans être perturbé par le Désir. Tout en sachant que la plage (et les beaux garçons en short de bain qui la rendent si belle) n’était qu’à quelques minutes de voiture et que je pourrais m’y rendre lorsque j’en aurai envie.
Jour 1, arrivée à la Clape.
En quittant la route pour emprunter le petit chemin qui mène au mas, on a l’impression de pénétrer dans un lieu situé hors du temps et de l’espace.
Le gîte est un ancien mas reconverti en accueil touristique, composé d’une grande bâtisse en pierre jaune avec un toit en tuiles rose. Il est entouré d’un grand jardin bordé de pins parasols, délimitant un espace clos qui ressemblerait presque à un cocon. Il règne ici un calme presque palpable, et le temps semble s’écouler au ralenti. Ici, on a envie de se poser et de se laisser porter.
Marie-Line, la propriétaire des lieux, est une femme d’un certain âge, accueillante et avenante. Elle m’explique que j’aurai le gîte « La Clape » et que je serai tranquille car le deuxième gîte « La Plage » est occupé par Valentin, son petit-fils. Valentin, elle continue, vient de passer son bac et travaille comme animateur dans un camping à Gruissan. Il fait la saison pour se faire un peu d’argent, argent dont il a besoin pour préparer ses études à venir. Et elle s’empresse d’ajouter que son petit-fils n’est pas souvent là. Car, soit il rentre à pas d’heure, soit il découche. Heureusement qu’il ne travaille que l’après-midi et le soir !
Ma première rencontre avec toi, Valentin, je la fais donc à travers des mots de ta grand-mère. Et rien que ces quelques premiers éléments qu’elle m’apprend à ton sujet attisent furieusement ma curiosité.
Déjà, « Valentin » est un beau petit prénom de mec. « Il vient de passer son bac », ça donne une indication, comme un vertige, au sujet de l’insolence de ta jeunesse. Tu dois donc avoir 18 ou 19 ans. C’est l’âge de l’insouciance, l’âge de tous les possibles, de toutes les découvertes, de toutes les impertinences. « Animateur de camping », ça laisse imaginer un garçon extraverti, marrant, avec un certain bagout. Mais aussi un petit mec exposé à d’infinis regards, un garçon désiré, convoité, et, très probablement, pas mal sollicité. « Il rentre à pas d’heure », ça suggère un garçon qui aime faire la fête avec ses potes, un « couche-tard », « un fêtard ». Quant à la dernière indication, « il découche », ça pourrait même indiquer un « petit queutard ». Il ne m’en faut pas plus pour me faire de toi l’image d’un magnifique exemplaire de p’tit con, possiblement bien foutu, charmant par destin et charmeur par choix délibéré.
Ma curiosité piquée à vif, je suis très impatient de faire ta connaissance en vrai, p’tit Valentin.
En attendant, après m’être installé dans mon gîte, je sors faire quelques courses et je rentre pour dîner. Je lis un bouquin. Ce n’est qu’à la nuit tombée que je me cale enfin devant mon ordinateur. Je m’installe à la table située juste à côté de ma porte d’entrée, que la chaleur de cette chaude soirée m’impose de laisser ouverte.
Jour 1, la nuit.
Pendant toute la soirée, le chant incessant des cigales se mêle au tapotement discret des touches de mon clavier et au très léger ronronnement du refroidissement de mon ordinateur, doux accompagnement de mes heures d’introspection et d’évasion dans le monde de mes souvenirs et de mes plus belles années. Oui, je crois qu’ici je vais être bien pour achever mon histoire.
Au fur et a mesure que des pages se remplissent, tu « disparais » de ma mémoire, p’tit Valetin. Car, si je te fantasme déjà, je ne te connais pas encore. De ce fait, ta présence n’a pas encore impressionné mon esprit de façon indélébile comme une image aurait impressionné la pellicule d’un appareil argentique.
Mais tu ne vas pas tarder à faire ton apparition dans ma vie. Une entrée marquante, fracassante même.
Il est environ deux heures du matin lorsque ton arrivée m’est annoncée par le bruit d’un moteur de voiture, d’un claquement de porte dans l’allée de la maison, puis par le crissement de baskets sur les gravillons de la cour. C’est un pas rapide, cadencé, lourd. Pas de doute, c’est un pas de jeune mec.
Je détourne le regard de mon écran pour le glisser dans l’embrasure de la porte d’entrée de mon gîte. Je ne veux surtout pas rater ton arrivée. Les pas approchent encore et je vois enfin une silhouette se dessiner au fond du jardin. Et lorsque tu sors de la pénombre, lorsque tu arrives dans le champ d’action des lumières du jardin, j’ai envie de hurler de toutes mes forces :
« Oh, p-u-t-a-i-n, Valentin, mais qu’est-ce que tu es beaaaaaaaauuuuuuuuuu ! ».
Tu n’es ni petit ni très grand, je dirais un mètre soixante-dix environ. Tu arbores une belle petite gueule aux traits à la fois quelque peu enfantins et déjà masculins, un brushing de bogoss – les cheveux bruns coupés à blanc autour de la tête, insolemment plus longs au-dessus, coiffés de façon instable vers l’avant, t’obligeant à les rajuster régulièrement avec ta main, geste que tu fais en traversant le jardin – l’ensemble te donnant un air canaille à craquer !
Et puis, il y a la tenue. Ce soir, tu portes un t-shirt assez ajusté pour mettre en valeur ton torse en V, tes pecs déjà bien dessinés, pour coller à tes biceps. Le t-shirt est noir comme pour bien insister sur ta brunitude. Tu es déjà sacrement bien foutu pour ton jeune âge. Tu portes également un short en jeans avec les lisières plus claires, des baskets blanches, ainsi qu’un sac à dos rouge sur les épaules. Une tenue très « p’tit mâle sexy ». Tu es pile le genre de mec que j’appelle « un petit format très bien proportionné ».
Et, pour achever le tableau, il y a l’attitude. Tu traverses le jardin d’un pas assuré et nonchalant, de la même façon dont tu dois traverser ta jeunesse, en regardant tout droit devant toi, sans trop te poser des questions, sans remords, sans regrets. C’est beau l’insouciance. Je crois que c’est l’une des définitions de la jeunesse.
Soudain, les couplets d’une chanson résonnent dans ma tête.
Il venait d'avoir 18 ans
Il était beau comme un enfant
Fort comme un homme
https://www.youtube.com/watch?v=WEHzqKQDXuQ
Tu approches de la bâtisse, tu t’approches de moi, alors que mon regard est toujours rivé sur toi. Comment pourrait-il en être autrement ? Le mélange de la beauté et de la jeunesse est une drogue dure et violente, elle crée une addiction instantanée. J’ai désormais besoin de m’abreuver de ta présence, sans discontinuer.
Tu m’aperçois enfin, nos regards se croisent. Ça ne dure qu’une fraction de seconde, le temps que je réalise à quel point le mien peut sembler déplacé. Mais dans le reflet du tien, j’ai le temps de percevoir une certaine douceur. Soudain, mon corps et mon esprit sont traversés par un frisson inouï.
— Bonsoir, tu me lances sur un ton anodin, sans doute par politesse vis-à-vis d’un client de ta grand-mère.
Je ne suis sans doute à tes yeux qu’un client comme un autre. Alors que toi, tu es déjà tout pour moi, mon Alpha et mon Omega et ce, dès l’instant où je t’ai aperçu.
L’échange est infime, mais suffisant à me faire découvrir le son de ta voix, une voix de petit mec pas tout à fait mûre, mais avec déjà de belles intonations viriles.
— Bonsoir, je te salue, avec un temps de retard nécessaire à retrouver une portion de mes esprits, définitivement chamboulés par ton arrivée.
Comme une comète, ta trajectoire t’amène à t’approcher de moi, à environ deux mètres. Puis à t’éloigner à nouveau, tout droit vers ton logement situé juste à côté du mien.
Contact fugace, mais intriguant. Je n’en ai pas assez, j’ai besoin de te regarder, encore et encore, mais de plus près. J’ai besoin de m’imprégner de ta beauté, de ta jeune mais déjà affolante virilité. Mais tu ne t’arrêtes pas. De toute façon, tu n’as aucune raison de t’arrêter. Tu ne me connais pas, je ne suis qu’un « type » de passage, et pas non plus du genre causant ou avenant, et surtout pas du genre à savoir faire la conversation à un beau garçon comme toi. Car, face à un beau garçon comme toi, je perds tous mes moyens. Face à un beau garçon comme toi, je me sens comme un hobbit devant un Elfe. M’adresser à un beau garçon comme toi est pour moi mission impossible.
Mais alors que je m’attends à t’entendre rentrer dans ton logement, j’entends le bruit du sac qui tombe au sol sans trop d’égard, puis celui du frottement de la pierre d’un briquet. Tu fumes, petit mec. Je tends l’oreille et j’entends le bruit léger de tes expirations. Des volutes de fumée passent devant l’embrasure de ma porte, et l’odeur de ta cigarette arrive jusqu’à mes narines. Je crève d’envie de sortir, de poser une nouvelle fois mon regard sur toi, de te mater en train de fumer. Je suis certain que la cigarette doit te rendre encore plus sexy.
Mais je n’ose pas. Mes jambes n’obéissent pas à mon désir. Les secondes passent, une minute, deux minutes. Je t’entends pousser une expiration un peu plus appuyée que les autres, que je devine être la dernière. Je t’entends ramasser ton sac à dos. J’entends le bruit de la clé dans la serrure, de la porte qui s’ouvre, qui se referme derrière toi, accompagné d’un petit grincement des gonds. Un petit grincement qui, je l’ignore encore à cet instant, va vite devenir la signature sonore de l’achèvement de ces nuits d’été.
Tu viens de disparaître dans ta nuit solitaire, me laissant seul dans la mienne, avec en prime mille questions à ton sujet. Est-ce que tu rentres directement du taf ? Ou bien, as-tu passé du temps avec tes potes ? Ou alors, est-ce que tu étais avec une nana ?
Je tombe de fatigue, et je sais pertinemment que je n’ai plus rien à attendre de cette nuit chaude. Je sauvegarde mon fichier, je ferme mon ordinateur, ainsi que la porte de mon gîte. Je me glisse dans le lit, j’éteins la lumière. Et dans le noir, je me branle en pensant à toi, beau Valentin, juste de l’autre côté de la cloison. Je me branle, mon excitation décuplée par les bruits venant de « ton côté », qui me parlent de ta présence. Celui de la literie qui grince sous ton poids, celui des notifications de ton téléphone qui m’intriguent un peu plus à chaque fois. Avec qui échanges-tu, beau Valentin ? Qui a la chance de partager ta jeunesse, ton amitié, tes nuits ?
Et je jouis en pensant à toi, beau jeune mâle de près de vingt ans mon cadet, et néanmoins capable, en une poignée de secondes, d’éveiller en moi un désir brûlant.
Le temps de redescendre de mon orgasme, une pensée s’impose à moi. Il est désormais évident que pour le calme et la tranquillité que j’avais recherchées en venant ici, c’est raté. Car ta présence va me hanter pendant tout mon séjour.
Rien ne sert de vouloir fuir les tentations du Masculin, car elles savent nous suivre et nous poursuivre où que l’on aille.
Jour 2, le matin.
Ce matin, je me réveille à 7 heures. Et je me réveille en pensant à toi, beau Valentin, qui es certainement encore en train de dormir juste de l’autre côté de la cloison. Je me réveille en pensant à ta belle petite gueule, à ton corps. Mais aussi en imaginant ta queue, ainsi que cette trique qu’un p’tit mec de ton âge ne doit pas manquer d’avoir au réveil. Et je suis saisi d’une irrépressible envie de m’en occuper, de t’offrir un petit plaisir matinal, de te réveiller en te faisant une pipe aussi magistrale et solennelle que ta beauté l’impose. Je ne peux renoncer à me branler une nouvelle fois pour calmer ce feu que tu as démarré en moi avec ta courte mais intense apparition nocturne. Je jouis en t’imaginant en train de me baiser et de jouir en moi. C’est le tarif pour me décider enfin à me lever.
Après être passé à la douche, je vais prendre le petit déj que ta grand-mère a préparé sur la table du jardin.
Si seulement tu pouvais te joindre à nous, beau Valentin ! J’ai tellement envie de te voir de plus près, et à la lumière du jour ! Je suis certain que j’ai encore tant à découvrir de ta bogossitude, le grain de ta peau, son degré de matitude, d’éventuels petits grains de beauté que la pénombre m’aurait « cachés », et que sais-je d’autre.
Je raconte à ta grand-mère que je t’ai croisé cette nuit, elle me confie qu’elle trouve que tu rentres toujours trop tard, que tu devrais dormir davantage, qu’elle s’inquiète parfois, tout en concluant qu’« il faut bien que jeunesse se fasse ».
Je lui demande quelles études tu envisages de faire. Elle m’apprend ainsi que l’année prochaine tu vas intégrer une formation en STAPS. Ahhhhh ! STAPS, The formation de bogoss ! STAPS, ce lieu fantasmé et inaccessible, le repère de Petits Dieux dans la fleur de leur âge, de leur beauté, et de leur vigueur, un endroit que mon pote Stéphane a appelé un jour, avec une formule exquise, « L’Olympe ».
Dans ce lieu, tu seras entouré de tes pairs, d’autres bogoss de ton espèce. Vos bogossitudes ne ferons pas que s’additionner, ni même se multiplier entre elles. Non, ce serait plutôt une exponentiation. Rien que d’y penser, ça me donne le vertige. Des images viennent à moi de Petits Dieux partageant de longues séances de sport, de vestiaires, de douches. C’est comme essayer d’appréhender l’infinitude de l’Univers, c’est tout bonnement insoutenable, ça dépasse l’entendement.
Tu as déjà un beau petit physique, mais je suis certain que la pratique sportive va ajouter de très belles choses à ta plastique de p’tit con.
Ta grand-mère m’apprend qu’elle est ravie de t’avoir près d’elle pendant tout l’été, elle qui ne te voit pas assez souvent, elle qui a l’air de regretter que le temps passe si vite.
— J’ai l’impression que c’est hier que ma fille, sa mère, lui donnait le sein, et le voilà déjà transformé en beau jeune homme.
Ah, oui, c’est clair, je confirme très fort dans ma tête, tu es un très beau jeune homme, Valentin ! Si elle savait à quel point tu me fais envie, ta grand-mère en serait certainement outrée.
— Et depuis deux ans il fait de la musculation, il s’est vraiment bien développé, elle enchaîne.
Oui, oui, tu es vraiment très bien développé !
— Alors, les nénettes lui courent après…
Ça, je n’ai pas de mal à l’imaginer. Et à imaginer que certains garçons doivent en faire de même !
— Et il se laisse trop distraire…
— Il a une copine ? je l’interroge, « l’air de rien ».
— Une copine ? Une copine chaque soir, oui !
Ah, je le savais, bogoss et bon petit queutard ! Mon envie de toi atteint des sommets. Je ressens une nouvelle fois dans mon ventre cette chaleur qui annonce un intense envie de branlette.
— Il est beau garçon, c’est normal, je considère.
— J’espère seulement qu’il se protège, ce serait vraiment dommage qu’il chope une saloperie ou qu’il mette une fille une en cloque !
J’adore le franc parler de Marie-Line, et tout particulièrement sa générosité lorsqu’il s’agit de parler de son petit-fils. Elle a vraiment l’air de l’adorer, c’est très touchant. Elle est très fière du jeune homme que tu es devenu, tout en étant nostalgique de l’enfant que tu étais encore il n’y a pas si longtemps que ça.
— Au fait, il ne vient pas prendre le petit déj ? j’ai envie de savoir.
— Oh, pas de suite, non. Il n’émerge jamais avant 10h30.
Après que ta grand-mère a douché l’espoir de te voir débarquer pendant mon petit déj, je termine mon café et je reviens à mon gîte. Le matin est frais, tout comme l’esprit devrait l’être après une bonne nuit de sommeil. Ce sont les heures les plus agréables pour écrire.
Oui, le matin est frais. Mais pas mon esprit, pas aujourd’hui. J’ouvre l’ordinateur, mais je réalise très vite que je n’ai pas envie d’écrire. En fait, si, j’en ai envie. Le fait est que je n’ai pas la tête à ça. Car mon esprit est ailleurs. Mon esprit tout entier est avec toi. J’attends impatiemment que tu sortes de ton gîte, j’attends de te revoir. Suite à la conversation matinale avec ta grand-mère mon désir pour toi s’est fait encore plus intense, encore plus brûlant.
Je m’installe au jardin, sur un transat qui présente l’avantage d’être posé pile en face de ta porte, je m’installe un livre à la main. Mais même lire m’est pénible. Je fixe mon portable, guettant l’heure annoncée de ton réveil. Je fixe ta porte, guettant le moindre mouvement, le moindre bruit. Mais les cigales chantent toujours, et perturbent mon écoute. J’aimerais avoir le réglage du son pour pouvoir les faire taire jusqu’à ton « apparition ».
L’heure avancée par ta grand-mère arrive, mais ta porte demeure verrouillée. Il me faut attendre presque une demi-heure de plus pour que tu apparaisses enfin.
Tu te pointes avec un bon retard, à l’instar d’une popstar qui fait attendre ses fans pour bien faire monter l’excitation. Et tu soignes ton entrée en scène. Ton apparition est une claque inouïe.
Après le t-shirt noir de la veille, tu m’offres un voyage express à l’autre bout du spectre visible. Aujourd’hui, tu portes un t-shirt blanc délicieusement ajusté à tes épaules, la candeur du coton faisant ressortir encore plus la couleur mate de ta peau. Parce que, oui, évidemment, je ne m’y étais pas trompé, un beau petit brun comme toi a la peau mate. Bien mate. Ton t-shirt est comme une deuxième peau qui semble taillée sur mesure tant elle met en valeur les lignes de ton torse, un petit torse en V solide, de toute beauté. Un torse qui, si j’en crois au petit bout de peau visible dans l’échancrure du t-shirt, serait parfaitement imberbe.
Oui, en ce matin ensoleillé, je peux effectivement apprécier des détails que je n’ai pas pu apprécier cette nuit, rencontre trop fugace dans une lumière insuffisante, et recenser toutes les nuances de ta beauté bouleversante.
Je décèle ainsi un délicieux grain de beauté incrusté dans le creux de ton cou. Comme mon Jérém.
Tu portes également un short en jeans d’où dépassent des cuisses et des mollets solides et déjà un brin poilus. Cela laisse imaginer une pratique de sport régulière, couplée à une fréquentation tout aussi régulière de la salle de musculation. Quel sport pratiques tu, futur étudiant en STAPS ? Au vu de ton gabarit, je ne sais pas si tu es taillé pour le rugby. Ou alors, au poste de demi de mêlée, comme mon pote Thibault. Un poste à petit format très bien proportionné, quoi. Ou alors, tu es un footeux. Quoi qu’il en soit, je t’imagine avec tes camarades, sur un terrain, dans un vestiaire, sous les douches. Ah, putain !
Ce matin, tu as la gueule enfarinée, l’air plutôt à l’ouest. Le P’tit con, en tant qu’espèce, n’est pas du matin. Tes cheveux sont encore humides, tu dois sortir de la douche. Aussi, tu tiens une clope entre les lèvres. Tu mates déjà ton portable, tu tapotes sur l’écran. Tu n’as toujours pas capté ma présence.
Est-ce que tu es en train de lire un message envoyé par la nana que tu as baisée hier soir, ou bien es-tu en train de préparer la baise de ce soir ? Comment fais-tu tes rencontres ? Sur un réseau ou dans la vie réelle ? Ta grand-mère m’a parlé des pouffes qui te tournent autour, je les déteste déjà. Sinon, comment te comportes-tu dans un pieu ? Qu’est-ce qui te fait kiffer ?
Tu allumes ta clope, tu tires ta première taffe. Tu retiens brièvement la fumée, tu l’expulses lentement. Bien évidemment, je ne m’y étais pas trompé, ta façon de fumer est hyper sexy.
Je suis cueilli par une folle envie de me mettre à genoux devant toi et de te sucer pour bien te réveiller.
— Bonjour Tintin ! te lance ta grand-mère qui vient de réaliser que tu es levé.
— Bonjour Mamie ! tu lui lances en retour, sans pour autant lever les yeux de ton écran.
« Tintin », ce petit nom tout mignon venant de ta grand-mère, ainsi que ce mot enfantin « mamie » venant d’un garçon aussi sexy, ça me donne d’infinis frissons.
Tu finis ta clope, tu écrases ton mégot et tu fonces droit devant toi, complètement dans ta bulle, les yeux toujours rivés sur ton portable. Et tu ne captes ma présence que lorsque tu es tout proche de moi. Pendant un instant, j’ai l’impression que tu vas te prendre les pieds dans ma chaise longue, et tomber sur moi de tout ton poids. Si seulement ça pouvait être le cas ! Qu’est-ce que tu es beau de si près ! J’ai envie de toi à en crever !
Quand il s'est approché de moi
J'aurais donné n'importe quoi
Pour le séduire
— Bonjour ! je te salue de façon enjouée, à la fois pour t’avertir de ma présence, pour éviter l’accident de chaise longue, et pour te signifier ma joie de te revoir.
— Bonjour, tu me lances à la va vite, comme pour me signaler ton indifférence vis-à-vis de ma présence.
Ce matin, je n’arrive même pas à croiser ton regard. Et pourtant, ce n’est pas faute d’avoir essayé.
Tu n’as vraiment pas l’air d’être du matin. Ni de t’intéresser aux regards des garçons. Je sens que ça ne va pas être une mince affaire d’attirer ton attention.
Tu t’installes à la table du jardin, et ta grand-mère lance un deuxième service de petit déj pour s’adapter à tes horaires décalés. Un intense rayon de soleil arrive à se frayer un chemin à travers les cimes des pins parasols et se pose pile sur toi, tel un phare de théâtre qui mettrait en lumière l’acteur principal sur la scène. Le soleil ne se trompe pas. Car, ce matin, tu es l’acteur principal de ma scène, de mon théâtre.
Dans la lumière du matin, tes cheveux insolemment bruns en bataille, encore humides, brillent de mille reflets. Et le contraste entre ton visage d’ange et ton corps de petit Dieu me frappe de façon encore plus saisissante que la veille.
Dans la lumière du matin, ta jeunesse pétille comme la robe d’un Beaujolais nouveau.
Les Italiens disent que « il sole bacia i belli », que le soleil « aime embrasser la beauté ». Ce matin non plus il ne s’est pas trompé.
— Tu as bien dormi, Tintin ? j’entends Marie-Line te demander. Il y a tant d’amour dans cette simple question. Tu es son petit-fils adoré.
— Oui, très bien dormi, tu lui glisses en lui claquant la bise, sans même penser à lui poser la même question en retour. P’tit conitude rime souvent avec ingratitude.
C’est touchant ces échanges pleins d’affection entre grand-mère et petit fils.
— Tu as faim ?
— Oui, très faim !
Marie-Line disparaît alors dans sa cuisine et réapparait une minute plus tard avec un plateau rempli de toute sorte de victuailles.
— Tu as trop préparé, mamie !
— Tu n’es jamais là, alors quand tu es là, j’ai envie de te faire plaisir !
— Merci !
Tu dévores ton petit déj, visiblement tu avais très faim. Je ne me lasse pas de te regarder avaler l’une après l’autre les tartines que Marie-Line a beurrées pour toi. On dirait un gosse en train de prendre son goûter sous les yeux émerveillés et émus de sa grand-mère.
Et au fond de moi, je suis émoustillé par le contraste entre cette image de toi au p’tit déj et une autre l’idée qui me traverse l’esprit – une idée de pure spéculation, alimentée par les mots de ta grand-mère, et néanmoins insistante – l’idée que tu es probablement en train de « recharger tes batteries » après les « efforts » de la nuit dernière en compagnie d’une nana.
Une fois terminé ton petit déj, tu grilles une clope vite fait et tu disparais à nouveau dans ton gîte. Comment j’ai envie de te suivre et de te sucer !
Le spectacle terminé, je reviens à mon ordinateur et je tente une nouvelle fois de me mettre à écrire. Mais ce n’est pas la peine, je ne fais que penser à toi. Je ne fais que guetter ta sortie, à l’affût du moindre mouvement, du moindre bruit venant de ton gîte. Définitivement, pour le calme et la concentration et l’écriture, c’est raté.
Je pourrais peut-être me concentrer lorsque tu seras parti pour ta journée, et que je n’attendrais plus de te voir réapparaître d’un instant à l’autre.
En attendant ton départ, je retourne dans le jardin pour faire semblant de lire. Et pour ne pas rater ton « rappel », ta dernière apparition. J’essaie également de ne pas trop regarder mon portable, je me fais violence pour ne pas réinstaller l’application de rencontre. Mais tu m’as trop émoustillé, beau p’tit Tintin. Je sais très bien que je ne t’aurais pas, mais tu m’as donné une terrible envie de baiser. J’ai envie de baiser ce soir, ou cet après-midi. J’ai envie de baiser pour essayer de calmer le feu que tu as allumé en moi. Je me dis qu’après une bonne baise, je pourrais peut-être retrouver le calme devant mon clavier.
Tu ressors vers midi, la clope entre les lèvres, un gros casque bleu électrique sur les oreilles. Il fait déjà chaud, alors tu me fais le cadeau que j’attendais impatiemment depuis la veille.
Le voilà ce délicieux petit torse, il se présente enfin devant mes yeux. Il se dévoile dans toute sa splendeur, complètement imberbe, comme je l’avais deviné. Il affiche des pecs délicatement dessinés qui ne semblent demander qu’à être tâtés pour prendre la mesure de leur fermeté, de beaux tétons qui ne semblent réclamer qu’à être léchés et mordillés pour prendre la mesure de leur sensibilité, des abdos finement ciselés qui appellent les baisers et les caresses les plus brûlantes. Et une sublime ligne de petits poils disparaissant sous l’élastique du short, délicate pilosité de p’tit mâle qui semble avoir été posée là dans le seul but d’être effleurée, humée, parcourue jusqu’à son bout le plus mystérieux.
Cerise sur le gâteau, pas un seul tatouage ne vient troubler la beauté naturelle, la simple et vertigineuse perfection de ce sublime corps de p’tit con.
Tu es juste une idée de la perfection telle que le Créateur doit l’avoir imaginée.
De la même façon qu’il existe un nombre d'or qui semble régir de nombreux équilibres naturels, j'ai le sentiment qu'il en existe un régissant la beauté plastique des garçons. Il s’agirait d’un ratio entre la taille et la masse musculaire, entre le galbe des pecs et la saillance des abdos, entre la puissance du cou et celle des biceps. En tout cas, ce « nombre d’or du Masculin » existe bien dans ma tête. Et de ce nombre d’or, mon p’tit Valentin, tu m’apparais à cet instant comme étant la plus parfaite incarnation.
Et devant ce torse si parfaitement dessiné, mon impression d’allure enfantine de la veille s’évapore définitivement. Car tu es tout simplement bandant.
Tu fumes ta clope en exhibant ta fabuleuse demi-nudité avec une aisance déconcertante, sans faire cas de la présence d’un parfait inconnu tel que je le suis.
Je voudrais oser te parler, ne serait-ce que pour me présenter. Ça te donnerait probablement l’envie, ou simplement l’occasion, d’en faire de même. Je voudrais que nous cessions d’être de parfaits étrangers. Mais évidemment je n’ose pas. Je ne sais pas comment m’adresser à toi, petit mec. Du haut de la moitié de mon âge, tu m’impressionnes. J’ai le sentiment que quoique je fasse, quoi que je dise, je n’arriverais pas à attirer ton attention, que je pourrais au mieux rencontrer ton indifférence, au pire ton agacement. Tu as l’air tellement absorbé par ton téléphone, par tes messages, par ta vie de jeune p’tit con. Mon existence n’a aucune chance de représenter le moindre intérêt à tes yeux. Les deux rivages de nos destins me paraissent si éloignées que je ne saurai imaginer un moyen de les relier.
Mais j’ai besoin de te contempler un peu plus, et de plus près. Et ça, je sais comment faire.
Comme tu n’approches pas de moi, c’est moi qui m’approche de toi. Je quitte la chaise longue pour regagner mon gîte, mouvement qui va me permettre, pendant une fraction de seconde, de t’approcher à moins de deux mètres
Je suis d’abord fauché par ta simple présence. J’ai l’impression d’en ressentir le rayonnement grandissant à chacun de mes pas, dans chaque cellule de mon corps, comme quand on s’approche d’une intense source de chaleur. Le rayonnement devient carrément brûlure lorsque je capte le regard que tu m’adresses alors que je suis au plus près de toi, juste avant de passer le seuil de mon gîte. Un regard « tiré à bout portant » et qui me fait chavirer. Et la brûlure devient carrément insupportable lorsque je suis confronté à ton parfum, d’une fraîcheur inouïe, mélangé à l’odeur de la fumée de ta cigarette, une sacrée signature olfactive des bogoss qui me frappe de plein fouet.
Aussi, tes cheveux sont désormais secs, ton brushing est achevé. Ah putain, comment elle est belle cette insolente crinière de jeune mâle ! Une fortune pour voir cet équilibre capillaire instable complètement défait par une baise intense !
Je viens de rentrer dans mon gîte, je m’enferme dans la salle de bain, et je me branle une nouvelle fois. Oui, encore. Je ne peux faire autrement. Je m’imagine à genoux devant toi, je t’imagine en train de jouir dans ma bouche, je m’imagine en train d’avaler ton jus de petit mec. Il a quel goût, ton jus de p’tit mâle ? Certainement, un goût qui doit ressembler à celui du bonheur.
Je viens tout juste de me finir lorsque je t’entends dire au revoir à ta grand-mère. Tes pas de plus en plus étouffés sur les gravillons me confirment ton départ. Tu t’éloignes de moi et ça me soulage, ça m’apaise. Je me dis que ton absence, ainsi que le calme apporté par cette troisième branlette en l’espace de quelques heures vont enfin créer des bonnes conditions pour retrouver le calme que je suis venu chercher ici et pour me remettre à écrire.
C’est ce que je fais, tout en me surprenant à rêvasser régulièrement à toi, beau Valentin.
Je tapote mon clavier jusqu’au milieu de l’après-midi, lorsque mon corps et mon esprit réclament une pause que je ne peux leur refuser.
En prenant le café avec Marie-Line, je l’interroge à nouveau discrètement à ton sujet. Je voudrais savoir prendre les infos directement à la source, je voudrais savoir te parler, te faire parler, ce serait délicieux de t’entendre me raconter un peu de ta vie. Mais c’est au-dessus de mes forces. Alors, pour en savoir un peu plus à ton sujet, je profite de l’amour que ta grand-mère te porte.
J’apprends alors que tu ne joues pas un rugby, mais au foot, et que tu es un grand passionné de ce sport. Que tu pratiques également la natation et, comme je l’avais deviné, de la musculation à la salle. Parce que, elle te cite, « tu veux prendre de la masse ». De la masse, ce sont des muscles. Hummmmm…
Pendant que j’écoute ta grand-mère, de nouvelles images de vestiaires, de douches, de proximité, de promiscuité entre jeunes mâles de ton espèce envahissent mon esprit et me donnent le tournis.
Jour 2, première nuit d’attente.
Le soir arrive, et le compte à rebours démarre. J’ai envie de me dire que ce soir tu termineras peut-être plus tôt, que tu n’auras pas l’occasion de lever une nana (je considère toujours pour acquis que ça a été le cas la nuit dernière, ma certitude se fondant par ailleurs sur le néant), que par conséquent tu rentreras également plus tôt, et que je trouverai le moyen de démarrer la conversation avec toi. D’autant plus que j’ai désormais quelques tuyaux pour le faire, ta future formation à STAPS, le foot, etc, etc !
J’ai envie de croire ce qui me fait plaisir.
Le jour décline, et je me dis que je n’ai plus que deux heures à attendre. A minuit, je commence à bailler. A une heure, tu n’es toujours pas là. Evidemment, ma spéculation était foireuse, tout comme celle de la veille certainement, et rien ne permettait de dire que tu rentrerais plus tôt que hier soir. Je me fais violence pour lutter contre le sommeil qui me guette.
Deux heures du mat’ arrive, et je commence à me dire que c’est foutu, que je ne vais pas tenir. Que, si ça se trouve, tu ne rentreras pas du tout. D’autant plus que, si j’en crois sa grand-mère, ce ne serait pas la première fois. Je commence sérieusement à croire que je ne te reverrai pas ce soir. Je suis très déçu.
Je suis en train de fermer la porte de mon gîte avant d’aller me coucher, lorsque j’entends le crissement de tes pas sur les gravillons de la cour. Je rouvre illico le battant, et je m’installe dare dare sur le pas de ma porte, avec l’intention précise de te revoir, tout en essayant de prendre la posture d’un gars qui cherche la fraîcheur du soir, sans arrière-pensées aucune au sujet de son p’tit voisin sexy.
Le hasard fait bien les choses, l’agencement des lieux fait qu’en allant ou en rentrant de ton travail, tu es à chaque fois obligé de passer devant ma porte fenêtre. Malheureusement, la cour est assez large pour que tu puisses rejoindre ton gîte en marchant à plusieurs mètres de distance de ma porte.
Il n’en demeure pas moins que tu es quand même obligé de te « montrer », de « défiler devant mes yeux », et ceci pour leur plus grand bonheur.
Je remarque que tu portes un autre t-shirt que celui de ce matin. Tes cheveux ont changé aussi. Si bien mis ce matin, ils sont désormais laissés en bataille. Est-ce que tu t’es douché ? Et si oui, pourquoi ? Est-ce que tu as baisé ?
Tu portes toujours ton grand casque bleu bien voyant sur tes oreilles, et tu écoutes de la musique à un niveau sonore défiant toutes les lois de la physique. Un casque qui, en plus de l’écran de ton téléphone, te coupe carrément du monde. Ce qui fait que lorsque tu passes à hauteur de ma porte fenêtre ouverte, tu ne te captes même pas ma présence. Cette nuit, je n’ai même pas droit à un échange de « Bonsoir », tout aussi délicieux que frustrant.
Mais je ne peux me résigner à ce raté. Je sors carrément dans le jardin, en essayant là aussi de prendre la posture d’un gars « qui cherche la fraîcheur du soir sans arrière-pensées au sujet de son p’tit voisin sexy ».
Tu es en train de fumer devant ta porte. Ta vision périphérique a dû capter le mouvement, et tu me vois enfin. Tu me salues. Bonsoir. Je te salue. Bonsoir.
Et là, surprise, tu ôtes le casque de tes oreilles, le laissant glisser autour de ton cou. C’est fou à quel point je trouve ce simple geste sexy à mort. Tu ne lâches pour autant pas l’écran de ton téléphone des yeux. Mais l’occasion est trop belle et trop rare, alors je dois en profiter coûte que coûte.
— Ta grand-mère m’a dit que tu travailles dans un camping… je tente de démarrer une conversation.
— Oui, c’est ça, tu me réponds.
Le ton de ta voix est distrait, un peu sec, distant, peu engageant. D’emblée, j’ai l’impression de te déranger, de forcer les choses. Je le savais. Je me sens mal à l’aise. Mais je me force à continuer à chercher de bâtir un pont entre nos deux mondes.
— Ta journée s’est bien passée ?
— Pas trop mal.
— Tu as fini tard…
— J’ai traîné avec des potes…
Et là, avant que j’aie le temps de trouver une nouvelle réplique, peut-être une façon de me dire de la fermer, tu me lances :
— T’en veux une ? tout en me tendant ton paquet de cigarettes.
Comme je me déteste, à cet instant, de devoir t’annoncer :
— Non, merci, je ne fume pas.
Une pause cigarette partagée aurait pu créer des liens. Je rate le coche. Comment je préfèrerais qu’il me tende autre chose que son paquet de clopes !
— D’accord, bonne nuit ! tu me glisses, en écrasant ton mégot.
Ça y est, au bout de même pas une dizaine d’échanges, tu dois déjà me trouver chiant.
Jour 3, le matin.
Ce matin, je me réveille de bonne heure. Ta grand-mère n’est pas encore levée, les battants de sa porte sont encore verrouillés. Tout comme ceux de la tienne. Je ressens en moi une terrible envie de taper à ta porte, de te réveiller, et de te proposer une bonne pipe pour calmer ta trique matinale. Le vent frais caresse ma peau, fait glisser le coton de mon t-shirt sur mes tétons. Je bande. J’ai envie de me branler. Je choisis plutôt d’aller marcher.
L’autocollant « A » posé sur la vitre arrière de ta petite voiture me parle de ton âge insolent.
Car tu es jeune, terriblement jeune. Et pourtant, il se dégage quelque chose d’éminemment sexuel de toi. Tu mets encore des céréales dans ton lait du matin, mais tu pues déjà le sexe.
Je te désire, je brûle d’envie de te faire découvrir le plaisir entre garçons, de me soumettre à toutes tes envies, de t’en faire découvrir des nouvelles et que tu ne soupçonnes même pas. Je ne demande qu’à t’offrir l’orgasme de ta vie.
Mais tu es bien trop jeune pour moi. Tu as l’âge que j’avais lors des premières révisions dans l’appart de la rue de la Colombette. Et moi, j’ai deux fois cet âge.
Mais en même temps, un adage bien judicieux estime que quand on est en âge de conduire, on est également en âge de baiser sans contraintes. Je me dis que ce serait juste te rendre service que de te faire découvrir « autre chose », l’amour entre garçons, en plus que celui avec une femme, que tu connais déjà a priori.
Oui, ce serait juste te rendre service que de t’apporter les éléments pour pouvoir choisir ce que tu aimes vraiment. Car, si d’aventure il s’avérait que tu aimes les garçons, un jour tu serais à l’étroit dans une vie d’hétéro. Autant savoir qu’il existe d’autres vies possibles.
Mais notre différence d’âge représente à mes yeux un obstacle insurmontable entre mon intimité et la tienne.
C’était l’été évidemment
Et j’ai compté en te voyant
Mes nuits d’automne
Et puis, qui suis-je pour prendre le risque et la responsabilité de te faire dévier d’une vie d’hétéro qui serait certainement plus simple à assumer que d’autres ?
Des matins, des journées et des nuits immuables.
Par la suite, « nos » matins se déroulent toujours de la même façon, sur un même rythme, suivant une même routine. Je me réveille de bonne heure, je me lève, je profite de la tranquillité et de la fraîcheur des premières heures de la journée, et de mes pensées pour écrire.
Et dès que ta grand-mère se lève, je prends le petit déjà avec elle. Puis, je m’installe dans le jardin avec un bouquin.
En réalité, je guette ton apparition. Et lorsque ta porte s’ouvre enfin, je me laisse à chaque fois surprendre et émoustiller par la façon dont un nouveau t-shirt – dans l’ordre, blanc, noir, gris, marron, vert militaire, les couleurs les plus bandantes qui soient – fait pétiller ta plastique de bogoss.
Je guette ton allure, ta tête du matin, je compte sur ta belle petite gueule enfarinée les heures de sommeil que tu as sacrifiées à tes plaisirs nocturnes. Je me demande avec qui tu as pris ton pied, je me demande si seulement cette personne a conscience de la chance qu’elle a de goûter à la virilité d’un p’tit mâle comme toi.
Je te mate en train de fumer ta première clope du matin, les traces de l’oreiller encore imprimées en 3D sur ta belle petite gueule. J’aimerais les voir de près ces traces, les couvrir de caresses et de bisous.
Bonjour/bonjour, ce sont toujours nos seuls échanges à ton réveil. Définitivement, tu n’es pas du matin, et ton regard n’est vraiment pas engageant à ce moment de la journée, encore moins que d’habitude. Du moins vis-à-vis de moi. Car ta grand-mère arrive parfaitement à te décrisper, elle. Elle arrive même à te faire sourire. Elle y arrive de par son amour sans conditions et totalement désintéressé. Elle y arrive de par sa gentillesse profonde, qui ne peut qu’attirer la reconnaissance, et de l’amour en retour.
Aaaahhh, qu’il est beau ce putain de sourire qui fait pétiller tes yeux, ta bouche, tes belles dents de jeune loup !
Lorsque tu t’installes à la table du jardin pour prendre ton petit déj, je guette les rayons de soleil qui filtrent des cimes des pins parasol, et qui trouvent le chemin pour se poser sur toi.
Frappées par la lumière claire et intense du matin, ta brunitude insolente et ta jeunesse impertinente brillent de mille feux. Tes cheveux apparaissent soyeux et brillants comme le poil d’un chiot, d’un jeune animal au sommet de sa beauté.
Je voudrais savoir oser. Oser me lever, m’approcher de toi, non pas pour te draguer, mais pour te demander si tu as seulement conscience de ta beauté bouleversante.
Faute de mieux, je te mate en train de dévorer ton petit déj, je t’écoute discuter avec ta grand-mère, je te regarde redevenir gosse, le temps de quelques tartines et d’un café au lait qu’elle a préparés pour toi.
En te matant, j’essaie à la fois d’être discret, mais aussi de croiser ton regard. J’ai besoin de croiser ton regard, d’être foudroyé par ta jeune mâlitude. Mais il m’est extrêmement difficile d’attirer ton attention. Tu ne quittes que rarement l’écran de ton portable des yeux, et même dans ces instants exceptionnels tu ne regardes pas dans ma direction. Tu es ailleurs, tu es dans ta vie à mille à l’heure, et tu n’as pas de temps à consacrer à un type chiant comme moi. Je me demande si tu t’es seulement rendu compte à quel point mes regards sont aimantés par ta beauté. Probablement pas. Le fait est que je n’existe pas pour toi. A tes yeux, je fais simplement partie du décor.
Lorsque tu disparais à nouveau dans ton gîte, je passe une autre bonne heure à attendre de te voir ressortir, à guetter l’instant où tu traverseras la cour pour amener ta bogossitude au camping, pour taper dans l’œil de tout un tas de pouffes, et certainement de quelques mecs comme moi que tu croises sur le chemin de ton existence, sans même en avoir conscience.
Dans la journée, j’écris pendant le plus clair de mon temps. Et, parfois, je m’autorise une pause. Je descends alors à la plage, je me baigne pendant de longues heures. Je me balade sur le sable chaud, je contemple la Création dans ce qu’elle sait offrir de plus beau, la vision de nombreux beaux garçons torse nu en bord de mer. Cela me distrait un peu du désir que tu fais flamber en moi un peu plus chaque jour. Un peu, jamais tout à fait. Car quoi que je fasse, où que j’aille, ce désir ne me quitte jamais vraiment.
Le soir, à partir de 23 heures, je piste ton retour. C’est un compte à rebours des plus pénibles, dans la mesure où je n’en connais pas la durée exacte, durée qui peut tout aussi bien s’étirer jusqu’au lendemain. J’ai cru comprendre que les soirs où tu découches tu envoies un message à ta grand-mère. Mais moi je n’ai pas de message. Alors j’attends ton retour, parfois jusqu’à trois heures du matin, tout en gaspillant ces heures, car ma fébrilité de te revoir me prive de la concentration nécessaire pour produire quoi que ce soit sur mon clavier.
Parfois tu ne rentres pas, et ma déception est immense. Je vis cela comme une claque violente.
Mais lorsque tu rentres, j’oublie les affres de l’attente. Lorsque j’entends le moteur de ta voiture approcher, puis tes pas sur les gravillons, des frissons délicieux traversent mon corps comme une énergie de bonheur. Tu n’es pas encore apparu devant moi, et déjà je me sens bien. Et déjà j’ai terriblement envie de toi. Réflexe pavlovien.
Hélas, si ton arrivée est à chaque fois un bonheur inouï pour mes yeux, ma frustration grandit de soir en soir. Car nos interactions n’évoluent guère. Après l’immuable « Bonsoir/Bonsoir », nos échanges ne vont pas bien loin. Tu n’es pas vraiment du genre causant. Et à mes questions au sujet de ta journée, qui me demandent pourtant une énergie folle pour seulement oser te les poser, tu réponds de façon tellement succincte que ça me décourage de t’en poser d’autres.
En réalité, au fond de moi, j’ai surtout l’impression de t’agacer à chaque fois que je t’adresse la parole. En fait, je crois que tu n’as aucunement envie d’échanger avec moi. D’ailleurs, tu ne m’as jamais posé la moindre question. Visiblement mon existence t’est complètement indifférente. Je suis en dehors de ton Univers.
Le grincement des gonds de ta porte sonne pour moi le glas d’une nouvelle défaite.
Changement de stratégie.
Un soir, j’ai une idée pour mieux apprécier ton arrivée nocturne. Dès que j’entendrai le bruit de ta voiture approcher, au lieu d’attendre ton « apparition » sagement assis dans mon gîte, je fermerai mon ordi et je filerai dare dare m’installer sur la chaise longue du jardin, un bouquin à la main, essayant d’avoir l’air de quelqu’un qui y est depuis un moment, et non pas de quelqu’un qui guette l’arrivé de son voisin bogoss. Je pourrai ainsi te voir défiler sur toute la longueur du jardin, et t’observer pendant toute la durée de ta clope. Et peut-être trouver enfin la façon de te parler.
Ce soir, tu as l’air fatigué. La journée a dû être longue, et la soirée aussi. Il ne faut pas l’oublier, malgré ce sublime corps d’homme, tu n’es encore qu’un gosse. Un gosse dont je voudrais arriver à attirer l’attention afin de créer un lien.
Le fait est que je ne supporte plus ce « sur place » de notre « relation ». J’ai besoin que ça évolue, ne serait-ce qu’un petit peu. Le temps presse. Dans quelques jours je vais partir, et je ne te reverrai vraisemblablement jamais. J’ai besoin de me rapprocher de toi. Ne serait-ce qu’un petit peu.
Hélas, ce soir encore, après ton « Bonsoir », certes accompagné d’un regard un brin surpris de me retrouver dans cette position inédite, ce maudit portable et ton satané casque bleu absorbent ton regard, ton attention.
Le grésillement de ton casque, ainsi que tes inspirations et tes expirations autour de la clope se mélangent au fond sonore tissé par les cigales. Je te regarde, le torse légèrement courbé vers l’avant, la tête penchée vers la lumière bleue du petit écran. Le rideau de tes cheveux mi longs retombe devant ton visage, et c’est fabuleusement beau ! Comment j’aimerais passer ma main dans ces cheveux, les ébouriffer et de caresser toute la nuit !
Mais je n’ose même pas m’adresser à toi, t’arracher à ta musique, à ton monde si prenant. J’aurais l’impression de t’importuner. Je n’ai surtout pas envie que tu me trouver encore plus chiant.
Certes, mon changement de stratégie n’a pas eu l’effet escompté sur notre « relation ». Mais ça m’a quand même permis de respirer ta bogossitude nocturne d’un peu plus près. C’est déjà pas mal. Car tu es juste beau à se damner.
Le soir suivant, je t’attends une nouvelle fois dans le jardin. Cette fois-ci, tu portes un beau t-shirt marron et blanc super bien coupé, les manchettes parfaitement ajustées à tes biceps, le coton bien collé à ton torse de p’tit con bien solide, à tes pecs saillants, et tes magnifiques cheveux partent dans tous les sens. Et ce geste régulier, répété, insisté, de passer la main dedans pour les rajuster, pour les remettre en place, pour les rabattre vers l’arrière, pour dompter leur indomptable longueur défiant la gravité, tout aussi indomptable que ta jeunesse défiant la Vie, ah, qu’il est beau et méga sexy ce geste !
Ce soir, tu es sur ton 31. Visiblement, tu étais de sortie. Visiblement, tu voulais mettre tes atouts en valeur. Tu voulais en mettre plein la vue. Et c’est formidablement bien réussi. Avec une petite gueule comme la tienne, un corps comme le tien, et un t-shirt pareil, qui pourrait bien te résister ? Tu pourrais baiser la Terre entière, tu ferais encore des envieux. Sur qui as-tu jeté ton dévolu ce soir ? Quelle nana a eu la chance de t’offrir du plaisir ? Est-ce qu’elle a été à la hauteur de tes attentes ? Est-ce qu’elle a su être à la hauteur de la chance d’avoir accès à la virilité d’un si beau garçon ?
La cigarette entre les lèvres, les mots me manquent pour dire à quel point tu es bandant.
Mais le meilleur reste à venir. Tu allumes ta clope, tu tires une taffe. Puis, tu la poses sur le rebord de la fenêtre. Et là, tu oses l’impensable. Tes bras se lèvent, tes doigts attrapent le col du t-shirt derrière ton cou, le geste est rapide, parfaitement maîtrisé, le coton glisse sur ta peau, les abdos apparaissent, puis, les pecs, les tétons, tes épaules, ton torse tout entier. La séquence est fascinante. Ta demi-nudité se dévoile devant mon regard ébahi, surpris et ému par cette vision inattendue.
Puis, comme pour m’achever, avec un geste assuré et nonchalant, tu balances le bout de coton sur ton épaule. Et tu cherches appui contre le mur, tu plies un genou et tu poses la plante de ton pied juste à côté du cadre de la porte.
— Il fait chaud, tu me lances, en surprenant une nouvelle fois mon regard sur toi, un regard qui doit trahir toute ma surprise, mon besoin de contemplation et mon désir.
Cette nuit, plus que jamais, ton regard et ton petit sourire pétillent comme les étoiles dans une nuit très claire.
Tu ne sais pas à quel point il fait chaud, depuis que tu as ôté ton t-shirt ! Tu viens d’ajouter bien quelques dizaines de degrés à cette déjà chaude nuit estivale. J’ai l’impression d’être dans un hammam !
Et la température a d’autant plus grimpé en moi que, dans cette posture, tu fais remonter en moi un souvenir vieux de vingt ans. C’est le souvenir d’un autre garçon, le souvenir d’un jour lointain, un garçon que je croyais à l’époque tout aussi inaccessible que tu l’es pour moi à cet instant, un garçon très brun, dans une vigne, les épaules appuyées contre un chêne, le dos légèrement cambré, le bassin vers l’avant, le genou plié, le pied posé contre le tronc, en train de fumer devant moi.
Il ne manquerait plus que tu ouvres le premier bouton de ton short, parce que tu as « vraiment trop chaud », comme il l’avait fait à cette même occasion, pour que la confusion soit totale.
Depuis Jérém, mon regard et mon désir est très souvent attiré par le même genre de mec. Ainsi, le désir pour un beau garçon se mélange souvent à la nostalgie et à la mélancolie.
Beau Valentin, ce soir, dans cette posture, tu me fais terriblement penser à lui le jour de notre retour du voyage scolaire en Italie, lors de notre pause dans un vignoble dans le Rhône. Alors, comment ne pas me demander si ton geste d’ôter le t-shirt est seulement une façon de soulager ton torse de la chaleur de cette nuit, ou bien s’il n’y a pas également, comme ça avait été le cas chez lui, ce jour-là, la volonté de me chercher, de me provoquer, de me tester ? Est-ce que tu guettes mes regards pour mesurer l’effet que ton geste provoqué en moi ? Cette nuit, passé et présent se mélangent, l’image de deux garçons se superposent.
Quand les souvenirs s'en mêlent
Les larmes me viennent
Et le chant des sirènes
Me replonge en hiver.
https://www.youtube.com/watch?v=Mqb8weZrKN4
A cet instant précis, Valentin, devient Jérém. A distance de vingt ans, les deux bogoss ont en commun l’âge, 18 ans, celui de toutes les promesses et de tous les possibles, une beauté à peine croyable, un regard brun et charmeur, un corps qui inspirent un désir brûlant, incandescent, assommant. Mais aussi un parfum enivrant, une attitude, la façon de tenir la cigarette entre le pouce et l’index, ou de la poser nonchalamment entre les lèvres.
Cette nuit, nous n’échangeons pas plus que d’habitude. Même presque pas du tout. Mais c’est dans le non verbal qu’il me semble déceler une évolution de ton côté. J’arrive de plus en plus souvent à croiser ton regard. Parfois, lorsque tu me prends en flagrant délit de matage, j’ai comme l’impression qu’un léger sourire charmeur fait son apparition sur tes lèvres.
Oui, tu as capté que ton geste a provoqué pas mal d’émotions chez moi. Et tu as l’air d’être fier de toi. Tu sais désormais que je te kiffe. Et a priori ça ne te vexe pas. Ça ne t’offusque pas. Ça n’entraîne pas de réaction violente ou de dégoût. C’est déjà ça. Au contraire, ça a même plutôt l’air de t’amuser et de flatter ton égo. Mais que vais-tu faire de cette info ? Est-ce qu’elle te suffit et tu ne chercher rien de plus ?
Après cette nuit, et alors que j’arrive à la moitié de mon séjour, alors que je commençais à désespérer de pouvoir attirer ton attention, parce qu’il n’y avait eu jusque-là aucune « ouverture » de ta part, et que ma peur de te déplaire me tétanise, voilà qu’à ma grande surprise, « nos » nuits semblent enfin « évoluer ».
Le lendemain, je t’attends une nouvelle fois dans la chaise longue du jardin. Lorsque tu débarques, tu traverses l’espace sous mes yeux comme un mannequin sur le catwalk, tu avances d’un pas assuré. Tu sembler me considérer un peu mieux du regard en me lançant ton « Bonsoir ». Tu sembles plutôt satisfait de l’effet que tu me fais. Tu sembles même guetter et rechercher cet effet.
Tu termines ton « défilé » à hauteur de la porte de ton gîte. Comme la veille, tu allumes ta clope, tu tires une première taffe, tu la poses dur le rebord de la fenêtre. Puis, tu ôtes ton t-shirt, et tu le poses nonchalamment sur ton épaule. Tu as l’air satisfait de toi, flatté par mon regard. Et cette simple impression me donne des frissons inouïs.
Le troisième soir de cette nouvelle ère « Torse Nu », tu pousses le bouchon un peu plus loin. Tu innoves le « rituel » en te pointant déjà carrément torse nu, le t-shirt sur l’épaule.
Passé le premier choc, je te contemple sans discontinuer. De temps à autre, entre deux taffes, tu lèves les yeux de ton écran et tu me surprends en flagrant « délit » de matage. Peu à peu, et de plus en plus je me laisse surprendre « la main dans le sac », ou plutôt, « le regard sur ton corps ».
Désormais, j’ai l’impression de capter dans ton regard une certaine satisfaction, une certaine fierté dans le fait de te sentir regardé, désiré. Une impression qui se mue peu à peu en certitude.
Dis-moi, sublime p’tit con, est-ce vraiment seulement la chaleur nocturne qui te pousse à te foutre torse poil pour fumer ta dernière clope avant d’aller te coucher ? Réalises-tu l’effet que ta demi-nudité provoque en moi, mesures-tu la brusque montée du désir qu’elle entraîne ?
Tu cherches quoi, petit allumeur que tu es ? A jouer avec moi, à me rendre dingue de toi, sans par ailleurs avoir aucunement l’intention de passer à l’acte ? Ça t’amuse bien, ce petit jeu, n’est-ce pas ?
Est-ce que tu apprécies que je te mate ?
Est-ce que ça t’intrigue de savoir qu’un garçon s’intéresse à toi ?
Est-ce la première fois que tu réalises qu’un garçon en pince pour toi, ou bien tu t’es déjà rendu compte d’autres mecs se sont intéressés à toi ?
Est-ce que l’idée que ta jeune virilité provoque autant d’effet, même si c’est chez un garçon qui a le double de ton âge, ne te ferait pas bander ?
Est-ce que mon attirance te donne des idées ?
Est-ce que tu te poses des questions sur comment ça se passe au lit entre garçons ?
Est-ce que tu as déjà tenté quelque chose avec un pote ?
Est-ce que tu ne ressens pas en toi une petite envie de franchir le pas ?
Tu as peut-être compris que tu as une touche avec moi, que je te kiffe au point que tu pourrais me demander n’importe quoi, mon regard flatte peut-être ton égo, mais ce n’est pas forcément avec moi que tu aurais envie de franchir le pas. Pour tout un tas de raisons. Déjà, parce que tu es trop beau pour envisager un mec comme moi. Et puis, il y a la différence d’âge. Je n’ai jamais su être jeune, parler aux jeunes, même lorsque j’avais leur âge. Alors, comment l’être maintenant, comment leur parler maintenant, alors que j’approche la quarantaine ?
Chaque nuit, je regarde ce corps parfait qui se montre devant moi, je le désire plus que toute autre chose. Pendant quelques instants magiques, hors du temps, tu es le centre de mon monde, rien n’existe pour moi en dehors de toi, de ta beauté, de ta jeunesse, de ta virilité, de ce désir qui brûle en moi, qui me consume peu à peu.
Je voudrais oser parcourir ce chemin, franchir ce mur invisible qui nous sépare. Mais devant un sublime p’tit con de ton espèce, je suis comme pris de vertige. Du haut de tes 18 ans, tu possèdes désormais un immense pouvoir sur moi. Tu l’as bien compris. Et tu ne te gènes pas de l’exercer, nuit après nuit, torse nu après torse nu.
La première fois que je t’ai aperçu, je me suis dit que tu avais le visage et le regard d’un ange. Mais à mieux regarder, je dois me rendre à l’évidence. Derrière ces airs angéliques se cache un petit démon qui sait très bien comment s’y prendre pour me rendre dingue de lui et qui prend un malin plaisir à torturer mon esprit.
Il venait d'avoir 18 ans
C'était le plus bel argument de sa victoire
J’adore ces instants magiques, les deux ou trois minutes que dure ta dernière cigarette nocturne, pendant lequel je contemple ta magnifique demi-nudité, délicieux préalable à l’intense branlette que je vais me taper une fois que tu auras disparu de ma vue.
La vision de la beauté masculine est un fruit dont je ne me lasse pas, bien au contraire. Je deviens addict à ta demi-nudité, il m’en faut des doses de plus en plus importantes. Alors, j’essaie par tous les moyens de prolonger nos « rencontres » nocturnes.
Je me fais violence, je lutte contre la peur de t’agacer. Je tente l’impossible, détourner l’attention d’un garçon de 18 ans de l’écran de son téléphone. J’ai l’idée de te questionner au sujet de tes études à venir, de tes passions sportives, du foot. Questionner un beau garçon au sujet de ses passions est un bon moyen de le mettre à l’aise.
A ma grande surprise, tu te laisses « détourner » assez facilement. En fait, contrairement à « nos débuts », tu as envie de parler. Quelque chose a l’air d’avoir changé depuis que tu sais que je te kiffe à mort.
Tu m’apprends que tu as joué dans une équipe de foot régionale, et que tu aimes vraiment ça. Tu ajoutes que tu fais également de la natation et de la musculation. Je sais déjà tout ça, grâce à la loquacité de ta grand-mère à ton sujet, mais ça me fait plaisir de te l’entendre raconter de vive voix.
— Ça se voit, tu es bien musclé pour ton âge, je profite pour te glisser.
Tu ne réagis pas, du moins pas verbalement, à mon compliment, mais tu as l’air plutôt flatté. Et ça me suffit, ça me fait chaud au cœur.
Je pense à tes potes, à tes coéquipiers de foot, à tes camarades de natation ou de musculation. Je suis jaloux de votre amitié et de votre proximité que j’imagine, du fait qu’ils peuvent te côtoyer sans réticences, te voir sourire, te voir torse nu, parler avec toi sans être gêné comme je le suis. Oui, je suis jaloux de ces garçons inconnus qui peuvent même te voir à poil dans les vestiaires ou sous la douche, chose qui m’est définitivement interdite. Je jalouse leur libre accès au monde pour moi interdit de ton existence.
J’ai espéré, et presque tenu pour acquis, que nous trouverions d’autres sujets de conversation la nuit suivante, que notre complicité naissante continuerait de grandir. Mais avant cela, j’ai tenu pour acquis que tu rentrerais la nuit suivante. Hélas, ce n’est pas le cas.
J’ai toujours très mal vécu les nuits où tu ne rentrais pas. J’ai à chaque fois ressenti ton absence comme une immense gifle. Comme la preuve tangible que j’étais définitivement exclu de ta vie.
Mais cette nuit, après ce début de « rapprochement », ton absence m’est encore plus intolérable que jamais. Une fortune pour avoir ton portable et pouvoir te joindre. Même si je sais que je n’en ferais rien. Une fortune pour être une mouche, ou pour avoir la cape d’invisibilité de Potter, pour partir à ta recherche, pour savoir où tu es, avec qui tu es, et ce que tu es en train de faire.
Cette nuit, en me branlant presque désespérément, je me dis qu’il faut absolument que je te fasse du rentre dedans à la première occasion.
Des occasions pour tenter de t’approcher il pourrait y en avoir une chaque nuit, ou presque. Lorsque tu rentres, nous ne sommes que tous les deux, l’heure tardive complice.
Je me dis que si tu as capté mon désir pour toi, tu ne serais pas surpris qu’une nuit je verbalise ce désir par une proposition de t’offrir du plaisir. Il faudrait que je trouve le moyen de te faire comprendre que je ne te veux que du bien, que je ne te ferais que ce dont tu aurais envie, que ton plaisir serait mon plaisir à moi.
Comme à chacune de mes branlettes, j’essaie d’imaginer la façon d’approcher ta virilité. J’esquisse des scenarii pour t’aborder, je répète des dialogues pour te faire comprendre à quel point je pourrais te faire du bien, je tente d’imaginer tes réactions.
Et pourquoi me prendre la tête au fond, pourquoi ne pas faire au plus simple, au plus direct ? Pourquoi ne pas te proposer une pipe, tout simplement ? Une pipe ça ne se refuse pas, qu’elle soit dispensée par une nana ou par un mec, surtout à ton âge, l’âge où les hormones bouillonnantes et la curiosité permettent une certaine désinvolture vis-à-vis de la sexualité.
Mais une fois « revenu sur Terre », je chasse vite de ma tête ces pensées soudainement redevenues surréalistes. Si j’osais faire un truc pareil, tu me rirais au nez. Et il n’est pas exclu que ça arrive aux oreilles de ta grand-mère. J’ai peur de me taper la honte de ma vie.
Oui, des occasions pour tenter de t’approcher il pourrait y en avoir une chaque nuit. Mais je ne sais pas les provoquer, ces occasions. D’autres le sauraient probablement, mais pas moi.
Plus le temps passe, plus tous les ingrédients sont réunis pour l’addiction. Un beau gosse au physique avantageux et au regard et à l’attitude désormais résolument charmeurs. Les attentes interminables de l’instant magique où tu vas débarquer, sans même savoir si cet instant va avoir lieu. Le supplice de Tantale que de te voir apparaître enfin, le torse redessiné par un petit t-shirt à chaque fois bien ajusté, ou, pire, de te voir balader ta demi-nudité avec une aisance affolante.
Te voir débarquer, si insolemment beau, si jeune, si insaisissable, et te contempler, à la fois si près et si inaccessible, c’est à chaque fois un déchirement de plus en plus lancinant.
Nombreux sont les mecs croisés un jour qui m'ont fait cet effet, qui m’ont inspiré cette attirance furieuse et presque douloureuse. Mais la plupart du temps ça n’a été que la question d’un instant, d’une rencontre fortuite, d’une occasion rendue impossible par la configuration des événements. Un mec croisé dans la rue, dans un transport en commun, dans une salle d’attente, au supermarché, lors d’un rendez-vous professionnel. Des mecs croisés l’espace d’un instant, d’une minute, d’une heure. Des mecs que j’ai désirés, certes, mais que j’ai oubliés aussitôt que j’ai été éloigné d’eux. L’attirance ne survivant pas à la cessation du contact visuel, s’évanouissant aussi vite qu’elle est venue.
Avec toi, Valentin, le plus dur à endurer c’est de t’attendre nuit après nuit, tout en sachant qu’il ne se passera rien entre nous. C’est cette succession infinie de désir, d’espoirs sans fondement, et de déceptions cuisantes qui me terrasse. C’est te voir débouler dans la cour et sentir le cœur bondir et s'arracher de ma poitrine a l'idée d'une occasion que je sais manquée d’avance. C’est l’angoisse des jours qui avancent, et de la fin de mes vacances qui approche.
Le plus dur, c’est ce compte à rebours que je regarde défiler, impuissant, m’approchant inexorablement de l’instant où je devrai quitter les lieux, l’instant qui me rendra définitivement inaccessible ce qui avait peut-être été à ma portée pendant un temps assez long. L’instant où tu sortiras de ma vie.
Beau Valentin, tu es à la fois le bonheur le plus exquis, et la frustration la plus lancinante de ces jours et de ces nuits d’été.
Et puis, il y a eu l’orage.
Toi qui viens de lire cet épisode, tu t'es probablement trouvé dans la même situation que Nico face à un beau mec qui t'a fait vibrer. N'hésite pas, si tu le souhaites, à partager ici ton expérience.
Fabien